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Extrait de l'hebdo n°3969
Le 2 juin, les organisations syndicales ont adressé un courrier aux ministres du Travail et de l’Outre-mer. Elles alertent sur la situation explosive dans laquelle se trouve le territoire ultramarin et appellent à l’ouverture de concertations pour éradiquer les inégalités de traitement que subissent les Mahorais par rapport au reste de la population française.

« La situation à Mayotte est explosive. Les habitants de l’île n’en peuvent plus d’être traités comme des citoyens de seconde zone », écrivent Marylise Léon, secrétaire générale de la CFDT, et ses homologues de la CGT, de la CFE-CGC, de l’Unsa, de Solidaires et de la FSU. Six mois après les ravages provoqués par le cyclone Chido, les représentants des six organisations syndicales invitent la ministre du Travail, Catherine Vautrin, et le ministre de l’Outre-mer, Manuel Valls, à prendre la mesure des crises qui secouent le 101e département français. De fait, Mayotte est le territoire le plus pauvre de France : 77 % de ses habitants vivent en deçà du seuil de pauvreté ; seulement 35 % des plus de 65 ans perçoivent une pension (de 270 euros en moyenne) ; le RSA et les allocations familiales sont amputés d’une moitié par rapport aux montants en vigueur dans la métropole ; les aides au logement sont inexistantes…
Une prise en charge sanitaire indigne
« L’heure est à la reconstruction mais, depuis six mois, nos équipes constatent que, passés les travaux d’urgence, les chantiers n’avancent plus », déplorent le « sextette » syndical. Le cas du centre hospitalier de Mayotte est éloquent. Plus grande maternité de France, l’établissement « n’a toujours pas été mis hors d’eau. Une part importante de sa surface est toujours inutilisable, et le reste est protégé par des bâches donc inondé à la première pluie. La prise en charge sanitaire des habitants, et notamment des accouchements, est indigne. » Plus largement, l’intersyndicale pointe « les besoins immenses » de Mayotte en matière de services publics, qu’il s’agisse des transports, de l’éducation ou de la gestion des déchets.
“La convergence sociale ne peut pas attendre”
Alors que le projet de loi de refondation pour Mayotte (adoptée au Sénat le 27 mai et soumis aux députés jusqu’à la mi-juin) est susceptible d’apporter de premiers éléments de réponses, l’intersyndicale alerte sur les risques que ferait peser un texte mal ficelé – allusion limpide aux exonérations de cotisations et d’impôts dont bénéficieraient les entreprises de la future zone franche que souhaite créer le gouvernement. « Cela ne peut se faire sans contrepartie et sans engagements de la part des employeurs, que ce soit en termes de dialogue social, d’extension des conventions collectives ou de pouvoir d’achat », explique Pascal Catto, délégué confédéral chargé de l’Outre-mer. « Il ne faut pas créer un sentiment d’inégalité de traitement entre les aides aux entreprises et l’égalité réelle des droits à mettre en place pour la population », appuient les signataires.
La CFDT Mayotte auditionnée par l’Assemblée nationale
C’est justement au titre de cette « égalité réelle » que les auteurs du courrier demandent aux ministres d’anticiper la convergence des droits sociaux, pour l’instant promise à l’horizon 2031. « Celle-ci doit être mise en place au plus vite, en commençant par mettre fin à l’infériorité du Smic mahorais dès 2026. Nous demandons l’ouverture de concertations au plus vite, avec des modalités permettant l’association directe de nos organisations locales pour enfin mettre en place l’égalité des droits. » Selon le mouvement syndical français, il est grand temps d’en finir avec injustices historiques qui frappent nos compatriotes mahorais. Un message que la CFDT Mayotte délivrera ce 10 juin aux députés lors de son audition à l’Assemblée nationale.