Le tableau noir du mal-logement en Île-de-France

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icone Extrait de l'hebdo n°3983

Dans un rapport inédit publié le 13 octobre, la Fondation pour le logement évoque la précarité à laquelle sont aujourd’hui confrontés 10 % des Franciliens.

Par Anne-Sophie BallePublié le 21/10/2025 à 12h30

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© Pierre Faure - Fondation pour le logement

Il y a les rapports sur le mal-logement en France, publiés chaque année depuis 1995 par la Fondation pour le logement des défavorisés (ex-Fondation Abbé Pierre) ; et puis il y a les éclairages régionaux, plus dramatiques encore, tel celui publié à la mi-octobre pour l’Île-de-France… où se concentrent de manière criante toutes les facettes du mal-logement. Un « tableau noir », selon les termes employés par Éric Constantin, directeur régional de la Fondation, qui constate « une aggravation du nombre de ménages en surpeuplement accentué et du nombre de personnes sans domicile personnel ».

Le phénomène de suroccupation prend de l’ampleur

Ainsi, quelque 634 000 personnes vivent dans un logement qui manque d’au moins deux pièces par rapport à une occupation normale, un nombre a progressé de 8 % entre 2013 et 2020, date de la dernière enquête nationale logement de l’Insee. À cela s’ajoute 1,2 million de personnes modestes en situation de surpeuplement modéré… Au total, la Fondation pour le logement estime à 30 % les locataires franciliens concernés par une suroccupation, deux fois plus qu’ailleurs sur le territoire.

Mais là n’est peut-être pas le plus grave. Car les visages du mal-logement sont multiples. En Île-de-France, 1,3 million de personnes (soit 10 % des Franciliens) souffrent : d’un logement insalubre, d’un logement inadapté ou de devoir dormir dans la rue… Au total, l’Île-de-France concentre un tiers des 4,3 millions de personnes mal logées en France – et ce, alors qu’elle regroupe 18 % de la population nationale.

Parc insuffisant et dispositif d’hébergement d’urgence sous pression

En 2024, la région parisienne totalisait à elle seule 34 % des demandes HLM du pays, 53 % des recours Dalo (droit au logement opposable) déposés auprès des tribunaux administratifs et 39 % des expulsions locatives, qui ont concerné 8 000 ménages – un nombre en hausse de 30 % entre 2019 et 2024.

Dernière facette du mal-logement (probablement la plus sombre), la Fondation dénombre 125 523 personnes sans domicile dont environ 4 000 personnes sans abri et autant d’habitants de bidonvilles, les autres étant hébergées dans des structures d’accueil. Chaque soir en Île-de-France, 2 000 personnes sans domicile sont refoulées lorsqu’elles appellent le 115, faute d’un nombre suffisant de places dans les structures d’hébergement d’urgence. Christophe Robert, président de la Fondation, alerte régulièrement sur cette situation, alors même que l’État a triplé les places d’hébergement depuis 2012. « Mais le dispositif reste sous pression permanente », déplore Éric Constantin.

Rendez-vous manqué

À propos de l'auteur

Anne-Sophie Balle
Rédactrice en chef adjointe de Syndicalisme Hebdo

De ces chiffres la Fondation tire l’enseignement que la lutte contre le mal-logement fait figure de rendez-vous manqué : « Aucune politique durable et suffisamment ambitieuse n’a été mise en œuvre pour inverser la tendance sur le fond du mal-logement, alors même que certains arbitrages politiques alimentent eux-mêmes les causes du mal-logement. »

Des débats au sujet du mal-logement en Île-de-France

En marge de la publication de son rapport francilien, la Fondation pour le logement organise jusqu’au début du mois de novembre 2025 plusieurs tables rondes au sujet du mal-logement. Les premières (les 15 et 16 octobre) traitaient des mobilités résidentielles et de la précarité. Une dernière table ronde sera organisée sur les délais d’attente de logement social, le 5 novembre à Paris (inscriptions sur le site www.fondationpourlelogement.fr).