Extrait du magazine n°514
Dans la vallée de la Tarentaise, un ancien site industriel de métallurgie se prépare à muter en usine high-tech. Baptisée Ugi’Ring, cette entreprise spécialisée dans le recyclage de piles et de batteries devrait créer, à terme, 110 emplois directs. Reportage.

Réputée pour ses thermes et son cadre bucolique, La Léchère, petite commune de quelque 2 500 habitants située en moyenne Tarentaise, en Savoie, n’en oublie pas son passé industriel. Les usines font partie du paysage depuis plus de cent ans.
Ugitech est l’une d’elles. Spécialisée dans la production, la transformation et la commercialisation des produits longs en acier inoxydable et alliages (barre, fil machine et fil tréfilé), elle vient de racheter l’ancienne friche industrielle de Ferropem (fermée en 2022) pour y construire son usine de recyclage de piles et de batteries usagées. Un projet d’économie circulaire (revalorisation des déchets industriels) aussi enthousiasmant qu’inespéré selon Fabrice Ménager et Jérôme Levy, deux délégués syndicaux CFDT d’Ugitech.
« L’idée est qu’Ugitech puisse être autonome et “verte” en termes d’approvisionnement de matières premières, c’est-à-dire que nous n’ayons plus besoin d’utiliser le nickel, le molybdène, le manganèse et le fer issus de l’extraction minière en Indonésie, en Chine, en Amérique du Nord ou en Amérique du Sud. C’est fondamental car les coûts de nos matières premières ont beaucoup augmenté ces dernières années, menaçant la pérennité de nos activités sidérurgiques », explique Fabrice Ménager.
La nouvelle usine permettra ainsi de recycler les différents matériaux avant de les réinjecter dans la production. Autre atout de ce projet : la liaison ferroviaire entre les deux usines réduira le nombre de camions dans la vallée…
Les pouvoirs publics ne s’y sont pas trompés. Ils accompagnent d’ailleurs cette nouvelle activité à hauteur de 31 millions d’euros d’aides de l’État et de la région Auvergne-Rhône-Alpes. « Et ce projet créera de l’emploi », se réjouit le militant.

Embaucher localement et former
Cinquante personnes devraient en effet être recrutées au démarrage de la production de la nouvelle usine, en 2027, puis soixante autres d’ici à 2030 pour un total de 110 emplois directs, confirme le président d’Ugi’Ring, Frédéric Perret : « Les salariés seront tous du coin et formés aux métiers spécifiques d’Ugi’Ring. Nous allons redonner une vie économique à ces neuf hectares de friche industrielle. »
L’implantation de cette usine permettra également d’optimiser la construction de canalisations pour desservir la vallée en gaz, une opportunité non négligeable pour l’avenir d’une autre entreprise de la commune : Tokai Cobex Savoie. Cette dernière emploie aujourd’hui près de 300 salariés mais son avenir serait menacé sans cette nouvelle source d’énergie. « Notre entreprise pourrait utiliser ce gaz naturel, beaucoup moins carboné que le fioul lourd utilisé actuellement et qui doit disparaître en 2026 », se réjouit Jean-Luc Pozzalo, délégué syndical CFDT chez Tokai Cobex Savoie.
« Ugi’Ring est vital pour notre avenir économique », confirment le maire de La Léchère, Dominique Colliard, et le président de la communauté de communes des vallées d’Aigueblanche, André Pointet. Pour ces deux élus, il n’est pas question de renoncer à l’industrie. « Les usines ont toujours permis le développement de notre territoire. Sans elles, nous n’aurions pas pu créer la station de ski de Valmorel ou encore racheter les thermes et les développer… Et même si elle a fortement décliné ces dernières années, l’industrie représente encore un nombre significatif d’emplois. »
Le projet inquiète les riverains
Pour autant, la création de cette nouvelle usine n’a pas été une évidence pour tout le monde. Un collectif de riverains a notamment réuni plus de 10000 signatures contre le projet.
La principale inquiétude des habitants réside dans le classement Seveso seuil haut (établissement présentant des risques majeurs) de ce site. « Les risques sont limités et concernent surtout l’environnement, pas la santé publique. Il faudrait que la vallée soit complètement inondée pour que ce risque se produise », temporise Frédéric Bernard, le directeur d’Ugi’Ring.
Une enquête publique a par ailleurs permis de déminer les questions sensibles. Consultée à cette occasion, l’Agence régionale de santé a validé la poursuite du projet. Les travaux ont d’ores et déjà pu démarrer. Rendez-vous en 2027 pour l’inauguration…