L’accord Caring@Work de Publicis récompensé

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icone Extrait de l'hebdo n°3985

L’accord relatif à l’accompagnement des salariés traversant une période difficile de leur vie, signé chez Publicis, a été primé aux Assises du social, le 22 septembre. Il concerne l’ensemble des 5 000 salariés du groupe de communication en France et a reçu le prix Or de l’accord d’entreprise. Explications, avec les négociateurs CFDT.

Par Emmanuelle PiratPublié le 04/11/2025 à 13h00

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© Publicis France

Un salarié peut connaître des coups durs, traverser une mauvaise passe. C’est pour cette raison que le groupe Publicis a négocié l’accord Caring@Work (préoccupation d‘ailleurs assez inhabituelle dans le cadre du monde du travail) portant sur « l’accompagnement des salariés dans les moments difficiles de leur vie ». S’il a été signé il y a près de deux ans et demi, en juin 2023, sa qualité lui a valu d’être récemment distingué : il a reçu le prix Or du meilleur accord d’entreprise, remis lors des Assises du social, le 22 septembre dernier.

Au fil de la trentaine de pages de l’accord, on trouve plusieurs mesures déclinées autour de quatre axes ou situations particulières : la situation de proche aidant ; la situation de handicap ; les violences au sein du foyer ; la prévention et l’indemnisation des maladies (lire l’encadré). L’accord intègre également le dispositif spécifique Working with cancer, une initiative antérieure à la négociation de l’accord mais qui en fait désormais partie.

Tenir compte du changement d’époque

Pourquoi un groupe comme Publicis donne-t-il une telle importance à ces sujets ? Et comment ces derniers sont-ils arrivés sur la table de négociation ? Bien entendu, la situation personnelle du PDG, Arthur Sadoun, atteint d’un cancer en 2020 (il l’a révélé à l’ensemble des salariés en 2022), n’est pas étrangère à cette décision. C’est d’ailleurs sous son impulsion que l’initiative Working with cancer avait vu le jour. La démarche d’attention et de care (les soins) s’inscrit également plus largement dans le cadre de la politique globale de qualité de vie au travail portée par le groupe.

« Cela fait aussi partie des éléments d’attractivité de l’entreprise, pour attirer des talents », note Laurent Quintreau, délégué syndical de Publicis et l’un des quatre négociateurs de l’accord côté CFDT. « Et c’est reconnaître que les temps ont changé. Avant, dans les grandes années où les “créas” étaient les rois du pétrole, Publicis, c’était le genre de boîte où seuls les forts survivaient dans l’écosystème. Si tu n’étais pas fort, tu dégageais. Cet accord, c’est la reconnaissance d’une certaine forme de droit à la fragilité », estime le responsable syndical.

Selon les négociateurs CFDT Lydia Ofleidi, déléguée syndicale pour Publicis LMA (filiale basée à Marseille), et Christophe Rouland, membre du CSE de Re:Sources (branche technique du groupe, basée à Paris), cet accord représente une réelle avancée. « Jusqu’à présent, les personnes malades n’osaient pas parler. Elles craignaient d’être stigmatisées, que cela joue contre elles dans leur carrière. Ou elles se sentaient coupables de poser une journée afin de passer des examens médicaux. Cet accord a fait sauter un tabou. Maintenant, ces personnes se savent considérées », explique Lydia. C’est également une avancée en matière d’équité. « Avant, prendre une journée pouvait être considéré comme un arrangement personnel avec son responsable de service. Maintenant, c’est reconnu, et valable pour tous », ajoute Christophe.

Autorisation d’absence pour dépistage ou examen médical

Désormais, l’accord intègre une autorisation d’absence d’une demi-journée pour tous les salariés du groupe Publicis France (quelles que soient la forme et la nature de leur contrat, l’ancienneté) en vue de réaliser des examens de prévention ou des dépistages. « Quand on a signé l’accord, nous avions mis la barre d’âge à 45 ans. En mars dernier, on a fait évoluer l’accord et on a abaissé l’âge à 30 ans », souligne Christophe. Une mesure qui tient compte du fait que le cancer frappe des personnes de plus en plus jeunes. « Que cette demi-journée existe et qu’on en parle, c’est comme une piqûre de rappel pour les salariés. Parce que l’on trouve toujours une bonne raison – un dossier urgent, une réunion jugée indispensable… – pour ne pas aller faire ces examens », note Lydia. Cette absence n’entraîne aucune réduction de salaire, pas plus qu’elle n’est déduite des congés payés.

À propos de l'auteur

Emmanuelle Pirat
Journaliste

S’il est très difficile d’obtenir des éléments de bilan concernant l’application de cet accord (« Nous sommes dans le domaine du privé et de l’intime », rappelle Laurent Quintreau), Caring@Work a toutefois bénéficié d’une bonne communication, notamment sur la plateforme interne baptisée Marcel (en hommage au fondateur, Marcel Bleustein-Blanchet). Le groupe a même complété le dispositif par un réseau de secouristes en santé mentale (une quarantaine de personnes formées). « Quand je suis arrivée comme stagiaire dans le groupe, à 24 ans, j’étais en bonne santé et je ne me sentais pas concernée par ces sujets. Mais, aujourd’hui, je suis heureuse de voir que le groupe a évolué ! », conclut Lydia.

Des mesures mises en place par Publicis

• Situation de proche aidant : dons de jours, jours de congé supplémentaires, facilités d’organisation du travail, bienveillance.

• Violences au sein du foyer : création d’un référent violences au sein du groupe Publicis, aménagement du temps et du lieu de travail, autorisations d’absences complémentaires, accès à un logement d’urgence pour mise à l’abri, accompagnement dans des démarches de relogement, accompagnement administratif et technique (mise à disposition d’un téléphone portable…).

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