[Dossier] La quête du bonheur (1/5) abonné

Le bonheur au travail est le nouveau mantra des entreprises. Une tendance qui prête parfois à sourire, mais semble répondre à une attente des salariés. Car, derrière le concept, c’est bien la qualité de vie et le sens du travail qui sont en jeu.

Par La rédactionPublié le 20/01/2020 à 13h59

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La mode nous vient des États-Unis, comme souvent. Les Google et autres fleurons californiens ne promettent rien de moins que le bonheur au travail, grâce à l’avènement du happy [heureux], du fun [amusant] et du cool. Un salarié heureux est plus créatif, plus productif et donc plus rentable, explique benoîtement la littérature managériale, abondante sur le sujet. Les enfants gâtés de la Silicon Valley ne sont pas les seuls à bénéficier de toutes ces attentions. Les concepteurs de flex office en France aussi rivalisent d’imagination en créant des environnements colorés et ludiques, à grand renfort de capsules de sieste, cafétérias et salles de jeux appréciées dans l’univers des start-up, du conseil ou de la haute technologie.

Les grands groupes aussi se lancent, certains nomment même un chief happiness officer (CHO), manager du bonheur, nouvelle fonction RH à la croisée des chemins de la communication interne, du digital et de l’événementiel. « Le panier de fruits ou les chouquettes en réunion, c’est bien mais c’est une vision un peu réductrice de la mission des CHO, explique Olivier Toussaint, cofondateur du réseau LOptimisme.pro. Une démarche authentique suppose tout d’abord de faire émerger la demande des salariés. Dans certaines boîtes, écouter les gens, c’est révolutionnaire ! » Et Olivier Toussaint de citer SAP, un éditeur de logiciels qui offre du coaching personnel, une demande des salariés relayée par le CHO ; ou encore le grand magasin Le Bon Marché, à Paris, où le besoin de disposer d’un espace partagé s’est concrétisé sous la forme d’un jardin potager sur le toit.

JLBernaud OrianeSafreProust

 “La question du sens
est fondamentale”

Jean-Luc Bernaud est professeur
de psychologie au Conservatoire
national des arts et métiers

Découvrir son interview ici

À l’écoute, attentif, aux petits soins… Leur intérêt bien compris a amené les employeurs, notamment dans les secteurs en tension, à se préoccuper enfin de la qualité de vie de leurs salariés. C’est aussi une façon de prévenir le « risque de réputation ». Les notes et les appréciations laissées par d’anciens salariés sur les réseaux sociaux tels que Glassdoor ou ChooseMyCompany peuvent faire des ravages. « Le souci des employeurs aujourd’hui est de fidéliser les salariés et d’entretenir une relation saine du début à la fin, et c’est vrai tout autant vis-à-vis des cadres que du collaborateur lambda », estime Olivier Toussaint.

Vivre “L’expérience collaborateur”

Un enjeu présent à l’esprit de Sarah Cruveillé, promue DRH après une première mission de « responsable des parcours professionnels et du bien-être au travail » chez Xelya, prestataire de services informatiques, à Saint-Cloud, en région parisienne. « Nous ne prétendons pas faire le bonheur des salariés ! affirme-t-elle. En réalité, je conçois le bien-être au travail comme un préalable nécessaire à l’épanouissement professionnel des collaborateurs. »

L’entreprise envisage la question de l’« expérience collaborateur », en écho à l’« expérience utilisateur » dans le monde de l’informatique. « Nous sommes passés de 15 à 120 salariés depuis 2010, notre chiffre d’affaires a augmenté de 34 % en moyenne ces trois dernières années, explique Sarah Cruveillé. La croissance représente un défi car elle génère plus de travail, plus de stress, et il faut du temps pour ajuster les recrutements. » Chez Xelya, à la demande générale des salariés consultés (un CSE est en cours de constitution), une salle « zen » doit être bientôt installée, où l’on pourra s’adonner aux bienfaits d’une microsieste ou feuilleter un livre de la bibliothèque de l’entreprise.

L’environnement de travail a…

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