Une réforme injuste et brutale

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Les 10 points clés de la réforme

Le gouvernement a pris la décision de faire peser les efforts sur les salariés ayant commencé à travailler tôt et qui auraient pu partir à 60 ou 62 ans avec quarante-trois années de cotisation. Un choix brutal qui explique l’ampleur de la contestation.

Par Jérôme Citron— Publié le 02/06/2023 à 09h00

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Treize journées de mobilisation intersyndicale, des cortèges fournis partout en France, une opinion publique massivement opposée à la réforme… et un gouvernement qui reste sourd. Depuis le début de l’année, la contestation ne faiblit pas, mais n’a pas empêché le président de la République de promulguer la loi le 14 avril dernier, juste après la décision du Conseil constitutionnel, qui a validé les grandes lignes de la réforme des retraites. « La loi reste injuste et nous continuons à la combattre, mais force est de constater qu’elle va s’appliquer, résume Yvan Ricordeau, secrétaire national chargé des retraites. Notre rôle à présent est de peser sur tous les décrets d’application pour la rendre la plus supportable possible. »

“Cette loi est particulièrement dure car elle touche des gens qui croyaient être à l’abri d’une énième réforme des retraites. C’est bien une loi comptable.”

Yvan Ricordeau, secrétaire national, chargé du dossier des retraites à la CFDT.

En effet, si la réforme peut se résumer à un décalage général de deux ans du droit de partir à la retraite, le diable se cache dans les détails. Qui pourra encore bénéficier du dispositif pour carrière longue ? À quel niveau d’invalidité reconnu sera-t-il possible de faire une demande de départ anticipé ? Comment sera prise en compte la pénibilité ? Que faire si l’on bénéficie déjà d’un plan de départ négocié dans son entreprise sur la base d’un départ à 62 ans ? Quid des personnes qui arrivent en fin de droits au chômage et pour qui la possibilité de prendre leur retraite est repoussée ? Qui bénéficiera des 1 200 euros de retraite minimum promis ?

Les questions ne manquent pas, tout particulièrement chez les salariés qui sont à quelques mois du départ et qui voient leur projet remis en question. « Cette loi est particulièrement dure car elle touche des gens qui croyaient être à l’abri d’une énième réforme des retraites, analyse Yvan Ricordeau. C’est bien une loi comptable, qui n’a qu’un seul objectif : faire des économies rapidement, coûte que coûte. »

À propos de l'auteur

Jérôme Citron
rédacteur en chef adjoint de CFDT Magazine

Signe du manque d’intention sociale de la part de l’exécutif, la loi n’acte aucune avancée majeure sur la pénibilité. Et l’index seniors, unique et maigre mesure imaginée pour faire bouger les entreprises, a été retoqué par le Conseil constitutionnel. « Le gouvernement tente à présent d’amadouer les organisations syndicales en expliquant qu’il compte élaborer une grande loi travail qui contiendra des avancées sur ces deux sujets, souligne Yvan Ricordeau. Mais tout cela arrive bien tard. Il fallait commencer par-là, avant d’obliger tous les salariés à poursuivre deux ans de plus, quels que soient la pénibilité de leur travail et le taux d’emploi des seniors dans notre pays. »