28 % des personnes LGBT+ victimes d'agressions LGBTphobes au travail

iconeExtrait de l’hebdo n°3920

À l’occasion de la Journée internationale contre l’homophobie, la transphobie et la biphobie, le 17 mai, différentes études et rapports confirment malheureusement que la discrimination, le harcèlement et la violence envers les personnes LGBT+ se maintiennent à un niveau très élevé.

Par Sabine Izard— Publié le 17/05/2024 à 04h00 et mis à jour le 23/05/2024 à 14h21

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© Hanlucas Jérôme Leblois

À propos de l'auteur

Sabine Izard
Journaliste

Au travail comme ailleurs, les discriminations liées à l’orientation sexuelle et à l’identité de genre sont tenaces. Ainsi, selon le dernier baromètre de l’association L’Autre Cercle, qui œuvre pour l’inclusion des personnes LGBT+ au travail, et l’Ifop, près de trois employés LGBT+ sur dix (28 %) déclarent avoir été victimes en 2023 d’au moins une agression LGBTphobe au travail. « Un niveau qui reste élevé depuis plusieurs années, s’alarme l’association. En outre, ils sont plus de la moitié (53 %) à déclarer avoir entendu des expressions LGBTphobes. »

Les personnes transgenres et non binaires en première ligne

Selon l’association, « ces résultats sont significatifs des défis qui perdurent, notamment pour les personnes transgenres et non binaires, pour qui les LGBTphobies sont exacerbées. » Ils sont ainsi près de 35 % (contre 21 % pour l’ensemble des employés LGBT+) à déclarer avoir constaté des traitements inégaux du fait de leur orientation sexuelle ou de leur identité ou expression de genre, notamment dans le déroulement de leur carrière (34 % contre 20 %). Et plus d’un tiers (37 %) déclarent avoir subi au moins une agression sur le lieu de travail. Un résultat supérieur de 9 points à celui des employés LGBT+. L’association relève par ailleurs que si moins de 6 % des employés français se déclarent « mal à l’aise » en cas de coming-out d’un collègue gay ou bisexuel, ce chiffre grimpe à 21 % et 16 % en ce qui concerne les collègues transgenres et non binaires. « Un contexte non inclusif qui les pousse à renoncer plus que la moyenne des employés LGBT+ à indiquer le nom de leur conjoint·e sur leur mutuelle (46 % contre 23 %) ou encore à participer à un événement organisé par l’employeur où les conjoint·es sont invité·es (44 % contre 28 %). »

Même constat au niveau européen. Selon un rapport de l’Agence pour les droits fondamentaux, publié le 14 mai, les personnes transgenres, non binaires et présentant une variance de genre sont davantage confrontées au harcèlement et à la violence, notamment à l'école. Elles sont plus susceptibles d’être confrontées à des problèmes de santé mentale et d’avoir des pensées suicidaires. Elles sont également plus susceptibles de se retrouver sans abri et d’avoir du mal à accéder aux soins médicaux. Il en va de même pour les personnes LGBT+ avec un handicap, en difficulté financière ou appartenant à des groupes minoritaires ethniques, raciaux ou autres.

“On assiste aujourd’hui à un repli sur des positions conservatrices très inquiétantes”

« L’environnement […] se dégrade pour l’ensemble des personnes LGBT+ avec une libération de la parole LGBTphobe », confirme l’association SOS Homophobie, qui publie ce 17 mai son rapport annuel 2024. Malgré « des évolutions positives, surtout sur le plan législatif, ces dernières années, on assiste aujourd’hui à un repli sur des positions conservatrices très inquiétantes », s’alarme Julia Torlet, sa nouvelle présidente. Le rapport montre notamment qu'après une baisse des actes LGBTphobes depuis 2019, la tendance est de nouveau à la hausse. Ainsi, en 2023, l'association a reçu 28 % de témoignages en plus que l'année précédente, et le nombre d'agressions physiques a progressé de 40 % sur un an.

Pas de phobies au boulot

« Lutter contre les LGBTphobies doit reposer sur l’engagement de chacun et sur une action résolue des collectifs, nous nous y employons », rappelle de son côté Lydie Nicol, secrétaire nationale de la CFDT chargée de la lutte contre les discriminations et les pratiques syndicales. « Un effort particulier doit être réalisé contre la transphobie afin d’enrayer la montée des discriminations et des violences sur les lieux de travail, et pour que la section syndicale soit un lieu privilégié d’écoute et de protection. » Elle rappelle que le guide « Agir contre les discriminations LGBT dans le monde du travail » et des formations dédiées sont à disposition des militantes et des militants CFDT qui souhaitent agir pour prévenir ces phénomènes et accompagner les victimes. « Et comme chaque année, la CFDT participera aux marches des fiertés dans de très nombreuses villes de France sous la bannière « Pas de phobies au boulot ! » » 

La CFDT Louvre se mobilise contre les LGBTphobies

La section CFDT a fait carton plein, ce 17 mai, à l’occasion de la Journée internationale contre l’homophobie, la biphobie et la transphobie. Pour la seconde année consécutive, elle organisait pour les agents du musée une heure mensuelle d’information pour « Agir contre les LGBTphobies au travail ». Plus d’une centaine de personnes sont ainsi venues l’écouter ainsi que le ministère de la culture et l’association SOS homophobie, dans la grande salle de l’auditorium.

Il faut dire que la secrétaire générale de section, Valérie Baud, est une militante pour les droits LGBT+ de longue date. « Pour moi c’est une fête d’avoir l’auditorium du Louvre pour parler de ce sujet. Nous avions déjà organisé une rencontre l’an passé à la suite de l’agression d’un collègue homosexuel. Cette année, j’ai croisé un agent du Louvre en face d’un centre LGBT et qui m’a dit, terrifié, « surtout ne dis jamais à personne que tu m’as vu là ». J’ai été vraiment très attristée. Je me suis dit qu’il fallait continuer à informer les gens sur les violences et les discriminations dont sont victimes les personnes LGBT+ ».

« Moins d’une personne sur quatre parle de son identité de genre au travail », a rappelé la secrétaire nationale confédérale CFDT, Lydie Nicol, devant les agents présents dans l’auditorium. « Nous voulons que chacun puisse, dans son travail, se sentir libre de ses choix de vie et trouve sa place, en toute sérénité, dans son collectif de travail. La CFDT, c’est aussi ça. » « Moi je suis homosexuel et fier d’être un agent au Louvre homosexuel qui assume son homosexualité », a réagi, dans la salle, une personne présente. « J’ai été victime d’homophobie dans cet établissement et je salue le travail de la CFDT m’a soutenu jusqu’au bout, en toute discrétion, dans le cadre de cette discrimination dont j’ai été victime. » Une belle action syndicale !