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Extrait de l’hebdo n°3935
Lors de l’ouverture du troisième Plateforum, qui s’est déroulé à Paris les 25 et 26 septembre, les organisations syndicales françaises ont affiché leur détermination à ce que la nouvelle directive européenne sur le travail des plateformes soit fidèlement transposée dans le droit français.
Pour sa troisième édition, le forum des organisations syndicales européennes sur le travail des plateformes, intitulé Plateforum, s’est déroulé les 25 et 26 septembre, à Paris. La ville n’a pas été choisie par hasard : « La France est l’un des deux pays qui se sont opposés à la directive européenne sur le travail des plateformes jusqu’au bout », a rappelé d’emblée Tea Jarc, secrétaire confédérale de la Confédération européenne des syndicats, organisatrice du Plateforum avec les organisations syndicales françaises (dont la CFDT).
1. La Commission européenne a estimé en 2021 que quatre ans plus tard, en 2025, 43 millions de personnes dans l’UE travailleront pour une plateforme de travail numérique.
Cette directive – adoptée par le Conseil européen en février 2024 puis par le Parlement européen en avril de la même année – est considérée comme une avancée très importante. Elle consacre la présomption d’emploi avec une charge de la preuve qui incombe à la plateforme. Elle promet de réglementer l’utilisation des algorithmes utilisés dans la relation de travail. Enfin, elle donne des droits de représentation et de négociation aux travailleurs des plateformes1. « Ces dispositions marquent un tournant dans l’approche de l’UE en matière de droit du travail, en reconnaissant l’évolution du paysage professionnel au xxie siècle », a souligné Tea Jarc, et d’ajouter : « La balle est désormais dans le camp des États membres et de leurs gouvernements, qui doivent transposer les principales exigences de l’UE dans leur législation nationale. »
Le patronat freine des quatre fers
Un message repris en chœur par la CFDT, la CGT, la CFTC et FO, dont les représentants ont entouré Tea Jarc lors de la conférence de presse de lancement de l’événement. « Nous attendons beaucoup de la transposition de cette directive. Aujourd’hui, nous avons des travailleurs qui ont des conditions proches du salariat sans en avoir les avantages. Nous serons très vigilants pour avoir une transposition juste. La CFDT est déterminée à ce que cette transposition se fasse le plus rapidement possible », affirme Béatrice Lestic, secrétaire générale de la CFDT. Et de prévenir : « Ce qui sera difficile, ce sera la relation avec le gouvernement et avec le patronat. Car les organisations patronales sont contre l’application de la directive européenne. » Ce discours est globalement partagé par les autres organisations syndicales. « Nous avons aussi des craintes sur les moyens, a ajouté Anne Chatain, secrétaire générale adjointe de la CFTC. Est-ce qu’il y aura des moyens supplémentaires accordés à l’inspection du travail pour les contrôles ? »
En plénière, les débats se sont engagés avec le principal artisan de cette directive, Nicolas Schmit (commissaire européen à l’emploi et aux droits sociaux). Lors de la transposition, « il faut s’assurer que l’esprit de la directive ne soit pas affaibli », a prévenu le commissaire, devant un parterre de 180 personnes, issues d’organisations syndicales et d’ONG européennes. « Dans l’application de ce texte, les inspections du travail devront avoir un rôle très important. » Et d’ajouter : « Cette directive est capitale pour l’avenir du marché du travail, pour éviter qu’il ne soit totalement dérégulé. »