Smic : le groupe d’experts ne souhaite pas en finir avec les exonérations de cotisations

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iconeExtrait de l’hebdo n°3946

L’édition 2024 du rapport du groupe d’experts sur le Smic ne fait pas exception aux itérations des années précédentes : il ne recommande pas de coup de pouce au 1er janvier et plaide pour une réforme des règles de revalorisation automatique. Actualité oblige, les experts se sont penchés sur les exonérations de cotisations au niveau du Smic et ont un avis sur la question.

Par Fabrice Dedieu— Publié le 17/12/2024 à 15h24

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© Jean-Claude Moschetti/RÉA

1. Organisation de coopération et de développement économiques.

Le 1er janvier 2025 ne verra pas de revalorisation automatique du Smic. C’est que feu le gouvernement Barnier l’a anticipée, au 1er novembre 2024. Pour autant, le groupe d’experts sur le Smic – désormais présidé par Stéphane Carcillo (économiste, chef de la division emploi et revenus de l’OCDE1) – a livré, le 28 novembre, son rapport annuel relatif au salaire minimum et à son évolution, comme le prévoit la loi. D’année en année, les recommandations se suivent et se ressemblent. Les experts recommandent de « s’abstenir de tout coup de pouce » parce que les conditions économiques ne sont pas réunies et que ce « coup de pouce accentuerait la compression de l’échelle des salaires ». Pour favoriser « l’augmentation des revenus des travailleurs à bas salaires », le groupe d’experts estime que la mobilité salariale et professionnelle est à encourager.

Quid des exonérations de cotisations liées au Smic ?

Actualité oblige, les recommandations évoquent les exonérations de cotisations sur les salaires situés au niveau du Smic. Selon les experts, il ne faut pas toucher aux exonérations telles qu’elles existent aujourd’hui liées au Smic pour ne pas alourdir le coût du travail. Revoir ces dispositifs pourrait entraîner la disparition de 100 000 à 135 000 emplois selon leurs estimations, « ce scénario étant d’autant plus probable que le marché du travail est à l’arrêt et qu’une faible inflation limitera les possibilités de passer cette hausse du coût dans les prix ». Une telle recommandation est à l’opposé de celle des économistes Antoine Bozio et Étienne Wasmer, qui, dans leur rapport, proposaient de réduire les exonérations au niveau du Smic pour les recentrer sur les salaires compris entre 1,2 et 1,9 Smic et ainsi favoriser les augmentations de salaire.

Par ailleurs, les experts constatent dans les branches une « incitation actuelle à la non-conformité » au Smic et un « affaiblissement du rôle de la négociation collective ». À chaque augmentation du Smic, de nombreuses branches se retrouvent avec des échelons des grilles de salaires minimaux en dessous du Smic. Les négociations collectives ne sont pas assez dynamiques pour régler ce problème récurrent. Le groupe d’experts demande donc des dispositions afin de résoudre le problème. Enfin, « comme les années précédentes », une réforme des règles de revalorisation automatique du Smic est demandée. « L’objectif serait de mieux lier les revalorisations du Smic non seulement au coût de la vie et à la productivité, mais également au niveau, à la distribution et à l’évolution des autres salaires […]. L’évolution du Smic ne devrait pas être déconnectée de celle des autres salaires comme on l’a observé au cours des trois dernières années », indique le rapport.

Les préconisations de la CFDT

Appelée à contribuer, à l’instar de toutes les autres organisations syndicales représentatives, la CFDT a fait plusieurs propositions. En vue de favoriser la progression salariale, la CFDT propose que les conventions collectives intègrent des clauses de revalorisation de salaire bénéficiant aux personnes restées plus de deux ans au Smic au sein d’une même entreprise. Une « politique de progression salariale solide » est aussi nécessaire dans les entreprises, car elle constitue « un levier de fidélisation et de motivation ».

La CFDT a également insisté sur la réduction des inégalités salariales entre les femmes et les hommes en demandant notamment l’application de la directive européenne sur la transparence des salaires en France, de favoriser la mixité des métiers et d’améliorer la rémunération des personnes à temps partiel. Concernant les exonérations de cotisations, la CFDT plaide pour que ces dernières, au-delà de 1,6 Smic, deviennent « des aides directes conditionnées à l’amélioration de la qualité de l’emploi ».

À propos de l'auteur

Fabrice Dedieu
Journaliste

Enfin, « la CFDT continuera de réclamer de conditionner le bénéfice des exonérations générales de cotisations sociales au respect de la conformité au Smic des minima de branches ainsi qu’à l’obligation périodique de réexamen des classifications (tous les cinq ans) ». En cas de non-conformité, les exonérations seraient suspendues. De quoi alimenter le débat sur cet épineux sujet avec le prochain gouvernement…