Extrait du magazine n°513
Lydie Nicol, secrétaire nationale chargée de la lutte contre les discriminations revient sur la lutte contre la LGBTphobie qui fait partie de l'ADN de la CFDT.

Ce mois-ci marque les premières Marches des fiertés. Pourquoi la CFDT s’investit-elle sur ce sujet qui, pour beaucoup, relève de la sphère privée ?
Agir sur les grands défis de société, notamment ceux qui prônent l’émancipation et l’égalité des droits, est dans l’ADN de la CFDT depuis toujours. C’est ce qui nous a amenés à nous positionner en faveur du Pacs (Pacte civil de solidarité) puis à soutenir la loi en faveur du mariage pour tous. C’est avec cette même conviction que nous prenons part chaque année aux Marches des fiertés depuis les années 90 en nous montrant aux côtés des personnes LGBT+ qui se battent pour leurs droits. Ce mois des fiertés est aussi une « fenêtre médiatique » pour rendre visible ce que l’on fait dans la sphère du travail.
Le combat contre l’homophobie et la transphobie n’est jamais terminé. Il nécessite une vigilance de tous les instants, y compris sur les lieux de travail, où les discriminations sont encore trop présentes.
La loi française est pourtant claire. Est-ce à dire qu’elle n’est plus un garde-fou ?
Comme pour les autres discriminations, on a un arsenal juridique assez fourni mais pas suffisamment connu. Le contexte joue aussi pour beaucoup, avec un débat public complètement polarisé et des propos discriminatoires de plus en plus décomplexés. Si faire appliquer la loi n’est pas de notre ressort, rappeler aux employeurs qu’ils ont une responsabilité à assumer pour que ce genre de discriminations ne puisse pas exister sur les lieux de travail, c’est notre rôle de syndicalistes.
“Notre rôle, c'est de rappeler aux employeurs qu’ils ont une responsabilité à assumer pour que ce genre de discriminations ne puisse pas exister sur les lieux de travail.”
Et au-delà de l’interpellation, comment agir, syndicalement parlant ?
En rendant visible ce qui se fait dans les entreprises et les administrations grâce au travail des équipes CFDT. Or les militants investis nous le disent souvent : la meilleure façon d’agir n’est pas d’aller sur le terrain judiciaire mais plutôt sur celui du dialogue social avec l’employeur, afin d’agir sur la prévention, et être prêt pour l’accompagnement des victimes. Notre objectif, c’est bien de faire en sorte que nos élus soient reconnus comme des interlocuteurs privilégiés sur les questions LGBT+. Cela nécessite qu’on les outille et qu’on les forme. C’est tout l’enjeu de notre partenariat avec le mouvement associatif spécialiste de ces questions, notamment L’Autre Cercle.
Aux États-Unis, Donald Trump mène la charge contre les politiques DEI (diversité, équité, inclusion) et met la pression sur les entreprises françaises. Comment réagis-tu ?
Il faut d’abord, et c’est ce que nous avons fait, appeler les entreprises françaises à garder la tête froide. Nous avons quand même en France une Constitution, des lois… un cadre sécurisant, en somme. Cela étant dit, les entreprises ne doivent surtout pas se cacher derrière ce prétexte pour ne rien faire. Malheureusement, on peut compter sur les doigts de la main les entreprises françaises qui font de leur politique de diversité un véritable outil d’attractivité.
Très peu d’accords vont au-delà de l’égalité femme-homme ou du handicap en matière d’inclusion. C’est l’occasion pour nos élus de mettre le sujet sur la table et de questionner les employeurs sur leur stratégie en matière de diversité. Le combat contre les discriminations LGBT+ n’est jamais acquis. Cette salve américaine en est la preuve.