« Les soignantes connaissent aussi l’usure professionnelle »

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Ce que vivent les femmes

Catherine Cornibert est directrice de l’association Soins aux professionnels de la santé, à l’origine de la Maison des soignants. Un refuge pour professionnels en souffrance.

Par Fabrice Dedieu— Publié le 02/02/2024 à 14h20

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© Laurence Geai/Myop

Qu’est-ce que la Maison des soignants ?

C’est une structure située à Paris, ouverte en août 2021, et qui s’adresse à tous les professionnels de la santé, qu’ils soient soignants, paramédicaux, du médico-social, des structures administratives. C’est la concrétisation d’un besoin d’accompagnement apparu à la suite de la crise sanitaire. Elle a trois missions : soigner, former et permettre de se ressourcer. En ce qui concerne le soin, elle propose des entretiens avec des psychologues. Côté formation et information, elle organise des journées autour des risques psychosociaux et de la prévention, mais aussi sur la prévention du suicide et la reconversion professionnelle. Côté ressources, elle propose des ateliers pour gérer son stress et connaître ses droits, ainsi que des groupes de parole. Les professionnels qui viennent sont à 80 % des femmes, ce qui est représentatif de la part de femmes parmi les professions de santé.

Quels problèmes rencontrent ces soignantes ?

Ce sont surtout des aides-soignantes et des infirmières qui viennent. Elles connaissent une souffrance globale, physique, psychique et sociale, ressentent de la lassitude, de la fatigue, de la solitude. Nous essayons alors de les remettre en selle, de casser le cercle vicieux de l’épuisement pour qu’elles reprennent leur santé en main.

“Les aides-soignantes et les infirmières sont souvent très exposées à des charges physiques et mentales, selon les services. ”

Est-ce qu’elles sont exposées à des facteurs importants ?

À propos de l'auteur

Fabrice Dedieu
Journaliste

Oui, par exemple, les aides-soignantes et les infirmières sont souvent très exposées à des charges physiques et mentales, selon les services. Elles prennent en charge le patient, peuvent avoir une relation soignant-soigné plus importante que les médecins, peuvent porter des charges lourdes. Ce sont des métiers durs.

Quand on parle d’usure professionnelle, ce n’est pas que chez les mineurs, les soignantes connaissent aussi ce phénomène. Ce n’est pas étonnant qu’au bout de dix ans, elles changent de métier. Hormis cela, les femmes ont des spécificités biologiques, des cycles de vie comme la ménopause ou le cycle menstruel, propres à leur état. Il faut également prendre en compte le statut social et familial. Elles peuvent être plus atteintes physiquement, socialement et psychiquement que les hommes.

Par ailleurs, les femmes vont plus vers nos services que les hommes ; du fait de ces spécificités, elles en ont plus besoin et surtout elles ont moins d’ego pour le faire. Les hommes sont moins enclins à montrer qu’ils sont en souffrance. Tout ça doit être pris en compte pour améliorer la santé des soignantes et leur bien-être. Ça doit se faire avec d’autres professionnels de santé mais il faut aussi responsabiliser les politiques pour créer des environnements favorables aux femmes qui travaillent dans le domaine du soin.