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Extrait de l'hebdo n°3977
En vigueur depuis 2019, le plafonnement des loyers dans les zones tendues a fait ses preuves. Mais la fin de l’expérimentation est prévue en novembre 2026. La CFDT se mobilise et soutient la pétition lancée le 4 septembre par la Fondation pour le logement réclamant la pérennisation du dispositif.

Jusqu’à 1 700 euros économisés par les locataires en moyenne sur une année : c’est ce qu’a permis l’encadrement des loyers à Paris en 2024. Mieux, d’après Asso Bail (Brigade Associative Inter Locataires), créée à Lyon il y a deux ans, quelque 180 000 euros ont déjà été remboursés à une centaine de locataires accompagnés par l’association. « Dans le contexte actuel, où les niveaux de pauvreté augmentent partout, l’encadrement des loyers fait figure de bonne nouvelle », affirme Christophe Robert, délégué général de la Fondation pour le logement des défavorisés, qui vient de publier son cinquième baromètre sur le sujet1. « L’efficacité de ce dispositif est tangible. » Issu de la loi Alur (2014) puis de la loi Elan (2018), qui l’a restreint aux collectivités volontaires, l’encadrement des loyers, appliqué là où le déséquilibre entre l’offre et la demande est patent, s’est étendu depuis à 70 communes. Il vise à limiter les abus de la part des bailleurs en fixant un loyer maximal selon la taille du logement, ses caractéristiques, son emplacement et le loyer médian des logements comparables.
Des résultats en demi-teinte
Bien que l’encadrement soit respecté « de manière inégale », d’après la Fondation, dans les villes qui s’en donnent les moyens (site dédié aux signalements, contrôles aléatoires, mise en demeure des bailleurs, récupération des amendes), le dispositif semble avoir fait ses preuves : à Paris, ville pionnière dans ce domaine, 35 % des loyers dépassaient les plafonds en 2021, mais « seulement » 31 % en 2025. D’autres villes se distinguent par leur faible taux de dépassement comme Montpellier (12 %) ou par des améliorations, notamment à Bordeaux, Lille et Lyon. En revanche, les résultats sont plus inquiétants en banlieue parisienne, dans les territoires d’Est Ensemble (établissement public territorial du Grand Paris) et de Plaine Commune2, notamment, dont la majorité des annonces de location affichent des dépassements. En principe, depuis 2023, les annonces, y compris celles qui proviennent de particuliers, doivent mentionner ce loyer-plafond. Dans les faits, ce n’est pas toujours le cas…
Au total, le dépassement moyen en France relevé par le baromètre de la Fondation pour le logement s’élève à 192 euros par mois. Cette tendance au surloyer affecte particulièrement les petits logements (90 % des logements de 10 mètres carrés et moins), pénalisant ainsi les étudiants et les personnes à faibles revenus. C’est également une pratique de bailleurs qui n’hésitent pas à louer des passoires thermiques : 38 % d’étiquettes G sont proposées avec des dépassements, ce qui est interdit. « Tout plaide pour un renforcement des contrôles dans les zones tendues », explique ainsi un représentant de la Fondation.
Un système encore trop dissuasif
Grâce à cette mesure, des milliers de locataires ont déjà réussi à se faire rembourser des trop-perçus, mais c’est à eux de faire la démarche. Dans un contexte de pénurie de logements, la Fondation dénonce un système dissuasif et réclame une loi afin que les locataires puissent faire valoir leurs droits sans craindre d’entrer en conflit avec leur bailleur.
En résumé, le dispositif doit être mieux connu, mieux appliqué mais également renforcé par une loi qui le pérennise au-delà de son expérimentation. C’est l’objectif de la pétition commune3 de la Fondation pour le logement et de 25 associations partenaires mise en ligne sur change.org ; elle vise le cap des 100 000 signatures que les parlementaires puissent être interpellés.
L’État doit non seulement se charger de sanctionner les bailleurs qui abusent, plaident-ils, mais aussi mieux communiquer sur cette mesure « efficace et peu coûteuse pour les finances publiques ». Et il faut surtout la prolonger. Le législateur pourrait par exemple faciliter le recours des locataires en rallongeant à trois ans (au lieu de trois mois) le délai dont ils disposent pour contester le montant de leur loyer et mieux définir ce qu’est un « complément de loyer » – notion qui reste floue dans la loi actuelle. Il faudrait également augmenter le montant des amendes, élargir le champ de l’encadrement aux résidences étudiantes privées et mieux contrôler les professionnels de l’immobilier qui diffusent des annonces non conformes.