La pauvreté à son plus haut niveau en France

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icone Extrait de l'hebdo n°3974

En 2023, 15,4 % de la population française vivait en dessous du seuil de pauvreté – un niveau inédit depuis trente ans. Dans le même temps, les inégalités ont continué de croître et le fossé de se creuser entre les plus riches et les plus pauvres.

Par Sabine IzardPublié le 15/07/2025 à 12h00

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© Insee

C’est un record dont on se passerait bien. Selon l’Insee, l’institut de la statistique, 15,4 % de la population française – soit 9,8 millions de personnes – vivait sous le seuil de pauvreté en 2023, c’est-à-dire avec moins de 1 288 euros par mois pour une personne vivant seule1. Un niveau inédit depuis 1996, date à laquelle l’organisme a créé cet indicateur. Ce taux se révèle d’autant plus alarmant qu’il ne tient pas compte des personnes pauvres vivant en communauté (Ehpad, casernes, gendarmeries, foyers de travailleurs, cités universitaires, établissements pénitentiaires, communautés religieuses, etc.), des personnes sans abri, des ménages d’étudiants et de la population vivant en outre-mer, précise l’organisme.

Selon l’Insee, la pauvreté monétaire touche en premier lieu les chômeurs (36,1 %) et les personnes inactives (37,3 %), dont les étudiants. D’après Chantal Richard, chargée du dossier à la CFDT, ces chiffres sont une des conséquences de la réforme de l’assurance chômage voulue par le gouvernement en 2023 : « Nous savions qu’en diminuant le montant et la durée de l’allocation d’assurance chômage, la réforme allait augmenter le nombre de personnes pauvres. À l’époque, la CFDT avait alerté à ce propos. Malheureusement, les chiffres sont là pour le confirmer. »

Avoir un travail ne protège pas de la pauvreté

Et contrairement à ce que laisse entendre le gouvernement, « avoir un travail ne suffit pas aujourd’hui à sortir de la pauvreté. Il faut permettre aux gens d’accéder à un travail de qualité, qui leur offre la possibilité de vivre dignement ; améliorer l’accès au logement, à la santé… », poursuit la secrétaire confédérale. En effet, si on décortique les chiffres fournis par l’Insee, 6,6 % des salariés vivent en dessous du seuil de pauvreté en 2023, et 19,2 % des travailleurs indépendants. En outre, les inégalités continuent de se creuser. En 2023, les 20 % de personnes les plus aisées perçoivent une part de la somme des niveaux de vie 4,53 fois plus élevée que les 20 % de personnes les plus modestes.

« C’est un échec politique », affirmait la secrétaire générale de la CFDT, Marylise Léon, le 9 juillet, sur le réseau social LinkedIn. « En 2018, le président de la République promettait d’éradiquer la pauvreté. En 2025, le bilan est très décevant. Les dispositifs d’urgence du “quoi qu’il en coûte” ont temporairement limité les dégâts, mais rien n’a été pérennisé. Le retrait brutal de ces aides a laissé les plus précaires sans filet. »

À propos de l'auteur

Sabine Izard
Journaliste

Parallèlement, l’essor du temps partiel contraint, la multiplication des micro-emplois mal rémunérés et les réformes sociales injustes (assurance chômage, RSA…) « fragilisent toujours plus ceux qui vivent déjà avec peu », estime la secrétaire générale de la CFDT, selon qui la société civile, les associations et les syndicats doivent être pleinement associés à la conception et à la mise en œuvre des politiques publiques. « C’est en co-construisant que nous pourrons répondre durablement à l’urgence sociale […]. La pauvreté n’est pas une fatalité. Elle est le produit de nos choix politiques. »