Inégalités femmes / hommes

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Les 10 points clés de la réforme

Les mères, principales perdantes de la réforme ?

Par Fabrice Dedieu— Publié le 02/06/2023 à 09h00

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La réforme est-elle particulièrement injuste pour les femmes ? La question a fait débat dès le projet du gouvernement connu, même si Élisabeth Borne a tenté d’éteindre l’incendie – en vain – depuis les bancs de l’Assemblée nationaleen janvier dernier : « Je ne peux pas laisser dire que notre projet ne protégerait pas les femmes, au contraire. » Et la Première ministre de dérouler son argumentaire : la revalorisation des petites pensions profitera davantage aux femmes, les trimestres de certains congés parentaux seront pris en compte pour le dispositif carrière longue (dans la limite de quatre trimestres), le maintien des 67 ans pour l’annulation de la décote leur est favorable…

Des arguments incontestables, mais partiels. « On ne peut pas prétendre que cette réforme soit favorable aux femmes, tonne Béatrice Lestic, secrétaire nationale CFDT, chargée de l’égalité professionnelle. Présenter le maintien de l’annulation de la décote à 67 ans comme un progrès est intellectuellement malhonnête, puisque ça ne change rien à la situation actuelle. »

Et, s’il est vrai que la revalorisation du minimum contributif (Mico) va dans le bon sens et touchera davantage les femmes, cela ne signifie pas qu’elles percevront toutes une pension minimum de 1 200 euros par mois. Les femmes qui ont travaillé à temps partiel imposé ou qui se sont arrêtées de travailler pour élever leurs enfants seront loin de cet objectif (lire l’article du dossier).

Avec le report de l’âge de départ légal à 64 ans, les mères devront attendre deux ans de plus alors même qu’elles auront accumulé suffisamment de trimestres bien plus tôt.

Par ailleurs, le vrai point noir de cette réforme concerne les mères de famille. Ces dernières acquièrent en effet des trimestres supplémentaires pour chaque enfant (jusqu’à deux ans par enfant si elles ne partagent pas leurs trimestres avec leur conjoint, six trimestres au minimum si elles partagent). Ce coup de pouce, censé compenser les inégalités de carrière dues à la maternité, permet à nombre d’entre elles aujourd’hui de pouvoir partir à 62 ans sans décote. Or avec le report de l’âge de départ légal à 64 ans, elles devront attendre deux ans de plus alors même qu’elles auront accumulé suffisamment de trimestres bien plus tôt. Pour atténuer – un peu – cette injustice, la loi prévoit tout de même que les femmes qui dépasseront les quarante-trois annuités un an avant l’âge de départ bénéficieront d’une surcote de 1,25 % par trimestre supplémentaire cotisé à partir de 63 ans. Une mesure qui toucherait 130 000 femmes par an, selon des parlementaires Les Républicains.

Supprimer les écarts ?

Pour rappel, à la fin 2020, hors pension de réversion, les femmes touchent en moyenne 1 150 euros brut de retraite contre 1 930 euros brut pour les hommes. Par ailleurs, les femmes partent en retraite en moyenne sept mois après les hommes. Des chiffres qui reflètent les inégalités du monde du travail qui perdurent. Cette réforme n’aggrave donc pas la situation, mais ne comporte pas non plus de levier puissant pour compenser les inégalités de carrières professionnelles.