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En Tunisie, le pouvoir attaque le mouvement syndical

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Depuis des mois, la Tunisie s’enfonce dans la crise. Son Président poursuit sa dérive autocratique : opposants politiques, médias et syndicalistes sont dans sa ligne de mire. Un recul démocratique dénoncé par l’Union générale tunisienne du travail (UGTT), qui subit cette répression de plein fouet.

Par Guillaume Lefèvre— Publié le 03/03/2023 à 15h53

Esther Lynch, la secrétaire générale de la Confédération européenne des syndicats (CES), a rencontré Noureddine Taboubi, le secrétaire général de l’UGTT, le 17 février dernier.
Esther Lynch, la secrétaire générale de la Confédération européenne des syndicats (CES), a rencontré Noureddine Taboubi, le secrétaire général de l’UGTT, le 17 février dernier.© Etuc - CES

[Mise à jour du 3 mars à 16 h 50]
Alors que plusieurs délégations syndicales s’apprêtaient à gagner Tunis afin de participer à la manifestation du 4 mars contre la répression qui frappe le pays, des responsables CFDT, CGT et UGT (Espagne) se sont vu interdire l’entrée sur le territoire tunisien. Empêchant de fait toute expression de solidarité internationale avec l’UGTT et la société civile tunisienne, cette interdiction (après l’expulsion à la mi-février de la secrétaire générale de la CES, Esther Lynch) constitue une nouvelle violation des droits humains qui cible les syndicalistes et les autres voix s’élevant contre le régime tunisien. « La Tunisie est désormais un pays où les droits ne sont plus garantis », affirment la CFDT et la CGT dans un communiqué commun.

La déclaration de l’UGTT du 12 février ne souffre d’aucune ambiguïté. Son bureau exécutif y dénonce ouvertement « les attaques des autorités contre les syndicalistes et contre le droit de grève, nous dénonçons les arrestations ou les fausses accusations. Nous réaffirmons la détermination de tous les syndicalistes à affronter ces pratiques délictueuses et contraires à la loi ». Les campagnes d’arrestation aléatoires et de harcèlement des opposants et journalistes cachent, selon l’UGTT, « une volonté d’étouffer toute voix libre ou d’opposition ».

Dernier épisode de cette campagne de pression et d’intimidation : l’expulsion de la secrétaire générale de la Confédération européenne des syndicats (CES), Esther Lynch – venue participer à une manifestation contre la répression syndicale et les droits des travailleurs, le 19 février. « […] le Président tunisien Kaïs Saïed a publié un article sur son site officiel accusant la secrétaire générale de la CES d’avoir enfreint la loi en menaçant la sécurité du pays », déplore la CES. Un pays où les licenciements de responsables syndicaux et la multiplication des poursuites judiciaires à leur encontre sont légion, limitant ainsi les activités syndicales.

Une initiative nationale de sauvetage lancée par l’UGTT

« Ces tactiques font partie d’une campagne entreprise par le Président Saïed pour briser la résistance du syndicat envers ses décisions politiques qui font peser sur les gens ordinaires le prix de la crise économique, sociale et constitutionnelle », détaille la CES. Ces attaques se sont renforcées depuis que l’UGTT et des responsables de la société civile ont lancé une initiative nationale de sauvetage1 « Nous alertons sur la détérioration de la situation économique et sociale en l’absence de mesures claires de la part du gouvernement pour freiner la volatilité des prix et la dégradation du pouvoir d’achat, auxquels s’ajoutent les répercussions persistantes de la crise mondiale de l'énergie et des céréales sur notre pays. Nous mettons en garde contre la poursuite de la politique d’improvisation et d’inefficacité et l’absence de toute vision », expliquait alors le bureau exécutif national de l’UGTT.

De son côté, le secrétaire général de la CFDT et président de la CES, Laurent Berger, a réaffirmé sa solidarité et son soutien à l’UGTT. « Après la répression antisyndicale, les autorités tunisiennes tentent de museler la solidarité internationale. Cela nous rend encore plus déterminés à soutenir nos amis tunisiens dans leur combat pour la justice sociale. »