Élections fonction publique, les résultats

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iconeExtrait de l’hebdo n°3854

Du 1er au 8 décembre, les 5,6 millions d’agents publics étaient appelés à élire leurs représentants. Deux constats s’imposent : le paysage syndical ne change guère dans les trois versants de la fonction publique et l’abstention progresse fortement.

Par Guillaume Lefèvre— Publié le 20/12/2022 à 13h00

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© CFDT-Fonctions publiques

« La CFDT remercie les agents qui ont voté pour elle et ses militants, mobilisés depuis des mois pour faire de ces élections une réussite malgré le contexte difficile marqué par les crises successives et la forte inquiétude qui pèse sur l’avenir », réagissait la secrétaire nationale Jocelyne Cabanal au lendemain de l’annonce des résultats des élections de la fonction publique. Celles-ci viennent clore plusieurs mois de campagne et de mobilisation sur le terrain auprès des agents. Les grands équilibres, globalement, ne changent pas : la CFDT reste la deuxième organisation syndicale dans la territoriale (FPT), conserve sa troisième place dans la fonction publique hospitalière (FPH) et sa quatrième place dans la fonction publique de l’État (FPE).

En revanche, elle perd sa deuxième place au global dans les trois versants (18,6 % et – 0,4 par rapport à 2018) au profit de Force ouvrière, à quelques milliers de voix près (18,7 %, + 0,7). La CGT, elle, perd 1 point et passe sous le seuil des 21 % (20,9 %). L’Unsa termine quatrième (11,7 %, + 0,5) « Les résultats actuels montrent une stabilité dans les équilibres entre grandes organisations représentatives, et un resserrement tel que la CFDT cède la deuxième place pour 0,1 point », précise la CFDT-Fonctions publiques. Malgré cette ombre au tableau, « la CFDT conforte sa place de première organisation syndicale française tous secteurs confondus, accentuant son avance sur la CGT », qui perd plus d’un point dans chacun des trois versants, rappelle la Confédération. « Ces résultats appelleront dès les prochains jours une analyse approfondie pour permettre à la CFDT de répondre encore mieux aux attentes des adhérents et des collègues, insiste la CFDT-Fonctions publiques. Le travail de proximité installé depuis plusieurs années a d’ailleurs été salué par de bons résultats dans de nombreux ministères, collectivités territoriales et établissements de la fonction publique hospitalière. Ces signaux positifs nous incitent à renforcer nos pratiques pour un syndicalisme recentré sur le travail et la justice sociale. »

Dans la fonction publique de l’État

Dans la fonction publique de l’État, la CFDT obtient 13,3 % des voix (– 0,5 point par rapport à 2018), derrière FO (17,8 %, + 0,7), la FSU (17,1 %, + 0,8) et l’Unsa (16,4 %, + 0,6) mais devant la CGT (10,9 %, – 1,3 point). Les résultats sont évidemment contrastés selon les ministères, mais des progressions sont à noter dans de nombreux endroits : aux finances, chez les douaniers (lire l’encadré) ou encore aux ministères du Travail et de l’Écologie. Autres bonnes nouvelles, la CFDT termine première organisation à La Poste et à Orange, deux entreprises aujourd’hui privées mais qui emploient encore respectivement près de 53 000 et 20 500 fonctionnaires.

Dans la fonction publique territoriale

Dans la fonction publique territoriale, la CFDT confirme sa deuxième place avec 22,2 % des suffrages (contre 22,6 % en 2018) et réduit l’écart avec la CGT, qui perd 1 point par rapport au précédent scrutin (28,0 %). FO recueille 16 % des suffrages (– 0,1 point). Là encore, ces résultats globaux se traduisent par une très grande diversité sur l’ensemble du territoire. Sans surprise et pour l’exemple, la CFDT cartonne en Bretagne. Elle recueille 64,85 % des voix à l’agglomération de Lamballe Terre & Mer, 81,75 % à Dinan, 48,12 % à Guingamp ou 100 % à Loudéac. Jusqu’alors quatrième organisation au sein du Conseil régional d’Île-de-France, elle gagne deux places et se rapproche de la CGT. Enfin, à la mairie de Sarcelles, la CFDT est représentative dans toutes les instances (lire l’encadré).

Dans la fonction publique hospitalière

Dans la fonction publique hospitalière, la CFDT reste quasi stable à 23,7 % des voix (contre 24,1 % en 2018). Comme il y a quatre ans, elle est devancée par la CGT (30,0 %, – 1,4 point) et FO (26,6 %, + 1,9 point). Les résultats sont, dans ce versant aussi, très divers en fonction des territoires. La CFDT confirme son encrage ou réussit de très belles percées comme au centre hospitalier de Nancy (58,60 %) ou de Sens (68,77 %). De beaux scores ont aussi été réalisés en outre-mer. Au centre hospitalier de La Réunion, elle devient deuxième organisation (25,3 %). Au centre hospitalier de Tulle, bastion historique de la CGT, les militants ont ravi la première place (lire l’encadré). « Nous sommes confortés dans notre projet de syndicalisme de transformation sociale, a réagi la CFDT-Santé-Sociaux. Nous continuerons de nous battre auprès des pouvoirs publics pour que tous les salariés de la FPH bénéficient des 183 euros [du Ségur de la santé], quels que soient leur lieu d’exercice ou la fonction qu’ils occupent. »

Un taux élevé d’abstention : 56,3 %

Si, dans l’ensemble, les résultats de ces élections sont relativement stables, une alerte s’impose : l’abstention progresse dans les trois versants de la fonction publique. Dans la FPE, la participation s’élève à 44,9 %, soit près de 6 points de moins qu’en 2018. Dans la FPT, elle s’établit à 45,6 %, contre 51,8 % en 2018. Pour l’hospitalière, la participation n’atteint que 37,8 %, contre 44,2 % en 2018. Au total, seuls 43,7 % des agents publics ont participé à ce scrutin. Aucune organisation syndicale ne peut se réjouir de ce phénomène d’abstention qui, certes, n’est pas propre aux élections syndicales mais reste une tendance très préoccupante.

« Nous regrettons un taux de participation en recul. Un mauvais signe, sans doute renforcé par les difficultés que certains ont éprouvé avec la complexité des procédures de vote. Mais surtout un signal inquiétant pour une démocratie qui, scrutin après scrutin, enregistre des taux de participation en baisse », déplore Jocelyne Cabanal. « Dans des élections dont la préparation et le déroulement ont été particulièrement chaotiques, nous remercions l’ensemble des personnels des services qui ont œuvré dans un contexte où la volonté politique de l’ensemble des employeurs des trois versants a trop longtemps manqué pour réussir techniquement ces élections et améliorer la participation », regrette la CFDT-Fonctions publiques. « L’État employeur n’a pas anticipé l’ampleur du chantier que représente l’organisation d’un scrutin pour 1 million d’agents. Il a mis en difficulté des services exsangues et déjà surchargés, et a, in fine, découragé de trop nombreux agents de voter… », réagissait Alexis Torchet, secrétaire national du Sgen-CFDT.

Un chantier parmi d’autres, qu’il va falloir mener au cours des quatre prochaines années en vue de l’échéance de 2026. La CFDT en est convaincue : « Les élus CFDT seront présents auprès des agents de la fonction publique et des contractuels pour faire vivre un syndicalisme différent, un syndicalisme de dialogue, de construction et de résultats. Un syndicalisme au service des travailleurs. »

Trois exemples de succès CFDT

• Aux Douanes, la liste CFDT conforte sa première place. À l’échelle nationale, elle progresse de 3,7 points (27,66 %) ; mieux, elle est la seule organisation à progresser en nombre de voix. « C’est la validation claire de la ligne pugnace que nous portons et la confirmation de la justesse de nos idées de progrès social », affirme la CFDT-Douanes. Des résultats qui se traduisent localement. En Occitanie, elle décroche la première place (36,66 %, + 11,92 points) ; dans cette région, la CGT (24,20 %, – 8,13 points) et FO (14,49 %, – 2,13 points) sont en net recul. « Nous avons mis la CGT et FO K.-O., résume Maguelone Escande-Mus, secrétaire générale du Syndicat Occitanie des Finances. C’est une vraie satisfaction. » « On savoure notre résultat mais on ne compte pas se reposer dessus, insiste Patrick Yepez, technicien des systèmes d’information, secrétaire régional douane Montpellier et secrétaire interrégional Douane Occitanie. Nous devons être à la hauteur de la confiance que nous accordent les agents. »

• Carton plein à la mairie de Sarcelles : l’équipe CFDT de Florise Castard siégera dans toutes les instances (le comité social territorial, les trois commissions administratives paritaires et la commission consultative paritaire). Toutes instances confondues, la CFDT obtient huit sièges, tout comme l’Unsa, contre six pour la CGT, quatre pour FO et trois pour la FA-FPT. « C’est une belle reconnaissance du travail fourni, souligne Florise Castard. On va distribuer un tract de remerciement aux agents et nous ferons tout pour ne pas les décevoir. On a de nombreux projets sur lesquels travailler durant cette nouvelle mandature ! » La secrétaire de la section CFDT note aussi une participation en hausse dans sa collectivité, à 42,8 %. « Nous avons diffusé beaucoup d’informations, ce qui a incité les agents à voter. Et nous nous sommes beaucoup déplacés sur le terrain, dans les services, depuis deux ans, pour voir les collègues. Les agents se souviennent de nous. »

• « Une victoire historique et un énorme coup. C’est la reconnaissance de notre travail au quotidien auprès des agents », ont réagi les militants de la section du centre hospitalier de Tulle à l’annonce des résultats des élections. La CFDT multiplie son nombre de voix par 2,5 par rapport à 2018. Elle devient la première organisation syndicale dans ce bastion CGT. Elle remporte 49,2 % suffrages contre 34,4 % pour la CGT et 16, 5 % pour Sud. Présente jusqu’alors, FO disparaît du paysage syndical de l’établissement corrézien. Par ailleurs, et si l’abstention reste élevée, la participation a augmenté de 10 points par rapport au précédent scrutin – le signe que la CFDT a fait bouger les lignes. « Nous avons été partout, tout le temps, et les agents nous ont fait confiance », résume Marie-France Gratadour, secrétaire de la section depuis 2019 et agent de services hospitaliers.

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