Droits à congés payés et arrêt maladie : le Conseil constitutionnel valide une différence de traitement entre salariés

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iconeExtrait de l’hebdo n°3907

Le fait qu’un salarié en arrêt maladie pour un motif non professionnel n’acquière pas de congés payés durant cette période n’est pas contraire à la Constitution, a estimé, le 8 février, le Conseil constitutionnel. Cela laisse à l’exécutif le temps de se mettre en conformité avec le droit européen.

Par Sabine Izard— Publié le 13/02/2024 à 13h00

Le 8 février, sous la présidence de Laurent Fabius (au centre), les Sages ont rendu leur décision no 2023-1079 QPC relative à la conformité aux droits et libertés que la Constitution garantit de l’article L3141-3 du code du travail et du 5° de l’article L3141-5 du même code.
Le 8 février, sous la présidence de Laurent Fabius (au centre), les Sages ont rendu leur décision no 2023-1079 QPC relative à la conformité aux droits et libertés que la Constitution garantit de l’article L3141-3 du code du travail et du 5° de l’article L3141-5 du même code.© www.conseil-constitutionnel.fr

Le droit français n’est pas conforme au droit européen en matière d’acquisition de congés payés pendant un arrêt maladie ; il n’est néanmoins pas contraire à la Constitution française. Saisis d’une question prioritaire de constitutionnalité à ce sujet, les Sages ont décidé, le 8 février dernier, que les dispositions afférentes du code du travail étaient bien conformes aux principes garantis par la Constitution. Ce qui laisse une marge de manœuvre au gouvernement pour transposer correctement la directive de 2003 sur le temps de travail et se mettre enfin en conformité avec le droit de l’Union.

La décision nous apprend ainsi que le code du travail – qui lie l’acquisition de deux jours et demi de congé par mois à un « travail effectif » et, de ce fait, exclut de ce droit les arrêts maladie d’origine non professionnelle – ne porte pas atteinte au principe d’égalité devant la loi. Le Conseil constitutionnel considère en effet que le législateur peut établir une différence de traitement entre les salariés dès lors qu’elle résulte d’une différence de situation en rapport avec l’objet de la loi qui l’institue ; ce qui est ici le cas, à en croire les Sages. Ceux-ci ont également jugé que l’article du code du travail qui limite à un an le droit à congés payés des salariés en arrêt maladie à la suite d’un d’accident du travail ou d’une maladie professionnelle ne méconnaît pas le principe constitutionnel du droit au repos.

Une loi au printemps, probablement

Le législateur attendait cette décision pour savoir si, dans sa future loi, il pouvait faire une différence de traitement selon l’origine professionnelle ou non de l’arrêt de travail. Il a désormais carte blanche. Plusieurs possibilités s’offrent à lui, lesquelles, à ce stade, ne seraient pas tranchées. Il pourrait notamment maintenir cinq semaines de congés payés pour les salariés en arrêt de travail à la suite d’un accident du travail ou d’une maladie professionnelle (et devrait alors supprimer la durée limite d’acquisition actuellement fixée à un an afin de se conformer au droit de l’UE) et, en même temps, limiter à quatre semaines le droit à congés payés de tous les autres salariés. Ce point devrait être rapidement tranché et pourrait figurer dans la prochaine loi portant diverses dispositions d’adaptation au droit de l’Union européenne (DDADUE), qui sera examinée au Parlement au printemps prochain.

À propos de l'auteur

Sabine Izard
Rédactrice

Quant à savoir si la loi sera rétroactive ou non – et, si oui, pendant combien de temps –, la décision du Conseil constitutionnel ne dit rien. Mais, « a priori, le gouvernement n’a pas l’intention de gérer les situations passées », explique Delphine Meyer, du service juridique confédéral de la CFDT. Si tel est le cas, il est fort probable que la loi ne s’applique qu’aux situations à venir. À charge alors pour les salariés de saisir le juge afin de faire valoir leurs droits.