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Extrait de l’hebdo n°3858
En Occitanie, les militants CFDT des douanes ont convaincu plus d’un agent sur trois lors des élections professionnelles de la fonction publique. C’est une étape mais pas une fin en soi pour cette équipe qui n’entend pas s’arrêter en si bon chemin.

« Nous avons mis la CGT et FO K.-O. ! », résume Maguelone Escande-Mus, secrétaire générale du Syndicat occitan des Finances. C’est le moins que l’on puisse dire. Dans la région, la liste CFDT Douane Occitanie-CFTC a recueilli 36,66 % des suffrages, devant la CGT (24,20 %), l’Unsa (16,66 %), FO (14,49 %) et Solidaires (14,49 %). Elle progresse de 12 points par rapport au scrutin de 2018, alors que la CGT recule de 8 points et FO de 2. Elle compte 180 adhérents (pour 1 000 agents) répartis en trois sections : Montpellier, Perpignan et Toulouse, ville à laquelle est rattachée la Direction nationale des statistiques du commerce extérieur (DNSCE) – également située à Toulouse. En 2022, les équipes ont enregistré l’arrivée de 50 nouveaux adhérents. De tels résultats ne sont pas dus au hasard, mais le fruit de la mobilisation des militants depuis plus de dix ans.
Une stratégie de développement gagnante
« Il a fallu prendre le taureau par les cornes », se souvient Laurent Cesco, en poste au Perthus (Pyrénées-Orientales), contrôleur des douanes et secrétaire général adjoint de la CFDT-Douane. Lorsqu’il prend ses fonctions, Perpignan ressemble à un désert syndical pour la CFDT. En 2010, elle réalise un score de 4 % et ne compte que trois adhérents. Aujourd’hui, elle est première et compte 70 adhérents. « J’ai pu compter sur le soutien des copains de Montpellier qui nous ont aidés à nous développer. Puis nous sommes allés filer un coup de main aux Toulousains. » Une stratégie de développement par cercles concentriques qui connaît une réussite certaine.

Les résultats au sein de la DNSCE sont à l’image de ceux obtenus par les douaniers dans la région : en forte hausse. Alors qu’une liste y avait été déposée pour la première fois il y a quatre ans, l’équipe a recueilli 49,04 % des suffrages (contre 21,08 % en 2018) et décroché quatre des sept sièges au sein du futur comité social d’administration. « Certes, on espérait une progression, mais on ne s’attendait pas à un tel résultat ! », explique Matthieu Mailly, informaticien et secrétaire adjoint de la section toulousaine. Inattendu, peut-être, mais pas complètement imprévisible, alors que la jeune section est passée d’un adhérent à une douzaine.
Comment expliquer cette réussite ? « On n’a rien lâché jusqu’à la clôture du vote », rebondit Patrick Yepez, technicien des systèmes informatiques, secrétaire régional douane Montpellier et secrétaire interrégional Douane Occitanie. Allusion à la semaine du 1er au 8 décembre, lors de laquelle l’équipe a veillé à ce que chaque adhérent CFDT vote. Les coups de téléphone se sont multipliés… et 98 % des adhérents ont fait entendre leur voix. La même stratégie a été déployée auprès des sympathisants. Si cette opération phoning de dernière minute explique le succès le jour J, elle ne constitue que la partie émergée de l’iceberg.
La clé ? « Il n’y a pas de secret, résume prosaïquement Patrick. La période électorale n’est rien d’autre que la continuité de notre activité. On répond présents, on est à l’écoute. Et on multiplie les tournées de services. » Avec l’objectif de passer a minima trois fois par an dans chacun des services des territoires. Une priorité qui n’a rien d’évident eu égard à l’étendue du territoire et à l’éparpillement des agents. Des brigades de montagne aux brigades des villes, du Perthus à Auch et de Tarbes à Ax-les-Thermes, les militants ne rechignent pas à faire beaucoup de kilomètres. « C’est simple, on est passé deux fois plus que l’ensemble des syndicats réunis », précise Matthieu. Avec toujours en main un tract au sujet des problématiques locales ou nationales. « On ne fait pas que passer. On montre qu’on est utiles et qu’on répond aux attentes des agents et des adhérents. »
Agir sur le travail
La mission que s’est donnée la CFDT-Douane en Occitanie, c’est aussi d’agir sur le travail et le quotidien des agents… souvent avec un coup d’avance. La démonstration de son utilité et de son sérieux a d’ailleurs été faite pendant la crise Covid. En amont de la pandémie, la section de la DNSCE a poussé la direction à engager une réflexion sur les missions télétravaillables et une expérimentation autour du télétravail. Malgré les réticences de la hiérarchie (elle est contre par principe), la ténacité de la CFDT a permis d’ouvrir le chantier… et ainsi de basculer presque immédiatement dans ce mode d’organisation du travail lorsqu’il est devenu la règle.
La section CFDT veille évidemment à ce que le télétravail se déroule dans de bonnes conditions. En ce sens, elle revendique la mise en place d’une formation spécifique au management, notamment en ce qui concerne la gestion du travail en distanciel et présentiel. En outre, elle reste vigilante dès qu’un blocage est signalé par un agent. « On étudie les motivations et on demande à la direction de justifier son refus », explique Patrick. Si le télétravail est désormais plébiscité et bien installé (à raison de deux jours par semaine), la CFDT souhaite le porter à trois jours, ce qui correspond d’ailleurs à une volonté des agents.
Enfin, la CFDT-Douane procède également à un accompagnement personnalisé des adhérents (préparation de CV, de lettre de motivation ou sollicitation d’un entretien avec la direction en cas de refus d’une promotion) et veille au parcours de chacun. « L’opportunité nous est ainsi donnée de faire adhérer les collègues, précise Maguelone. On fait de la pédagogie, on assure un accompagnement individualisé, ce qui prend du temps… ». Autre singularité de la CFDT-Douane : elle agit pour tous les agents. À Toulouse, la section a organisé plusieurs ateliers dédiés aux contractuels. « On est la seule organisation à s’adresser à eux », détaille Matthieu.
Former les militants
« On savoure notre résultat mais on ne va pas se reposer dessus ! La CFDT, ce n’est pas qu’un sigle ; la CFDT, c’est un militant ou une militante aux côtés des collègues dans les services, le plus souvent possible. Nous devons être à la hauteur de la confiance que nous accordent les agents », insiste Patrick. Et l’année 2023 s’annonce chargée. Au programme, la gestion des conséquences du transfert annoncé des missions fiscales vers les finances publiques ou encore la revendication d’une mise en place d’un appui psychologique spécifique puisque les agents sont de plus en plus souvent confrontés à des situations conflictuelles et violentes.
Autre enjeu pour les douaniers occitans : la formation des adhérents et des militants. « Il est essentiel de donner à chacun les clés de lecture nécessaires, les moyens d’aborder les collègues et de les mettre dans les dispositions les plus confortables possibles. Un militant en confiance est un militant bien formé syndicalement, conclut Laurent Cesco. C’est aussi une CFDT plus visible et plus forte sur le terrain – un cercle vertueux ! »