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Extrait de l'hebdo n°3973
À Ahuy (Côte-d’Or / Bourgogne-Franche-Comté), les militants CFDT de la maison départementale de l’enfance agissent sur les conditions de travail et la qualité de vie au travail des agents.

Confiance : ces neuf lettres pourraient être la définition même de l’action syndicale menée par la CFDT du centre Simone-Veil d’Ahuy, un établissement social de la fonction publique hospitalière rattachée au conseil départemental1, dont la mission est d’assurer l’accueil d’urgence des enfants de 0 à 18 ans.
« Nous mettons la confiance au cœur de notre action ; si nous n’avons pas la confiance de nos collègues, on peut remuer ciel et terre, on n’arrivera à rien », explique Valérie Pia, auxiliaire puéricultrice, élue du CSE2 et secrétaire d’une section CFDT dont les effectifs sont en constance progression depuis plusieurs années. Sur 130 agents, 40 sont adhérents CFDT, soit environ 30 % de l’effectif ; ils n’étaient qu’une quinzaine il y a cinq ans… Cette forte implantation s’est traduite naturellement dans les urnes lors des dernières élections professionnelles, les candidats orange ayant récolté 61,54 % des suffrages (et quatre sièges sur six), devant la CGT (38,46 %). (Ce fossé, la section entend le creuser encore à l’issue de l’échéance électorale de décembre 2026.) La CFDT est d’autant plus satisfaite que le taux de participation a atteint 77,81 % !
Les collègues rejoignent d’eux-mêmes la section CFDT
« On ne va pas chercher les adhérents, insiste Valérie Pia. Ce sont eux qui viennent nous voir et qui demandent à nous rejoindre. » Pas de superpouvoir ou de baguette magique pour ces militantes et militants, ils utilisent simplement le levier de la proximité. « Elles ne sont jamais venues me solliciter de façon frontale », explique Karine Cordelier, secrétaire adjointe de la section et titulaire F3S-CT3, en parlant des « anciennes » de la section : « J’ai été sensibilisée au fil du temps, jusqu’à ce que je franchisse le pas, presque une évidence. J’ai d’ailleurs appris, après mon adhésion, qu’elles m’avaient appuyée à certaines étapes de mon parcours. » Une façon de faire à laquelle Valérie Aumaréchal, éducatrice de jeunes enfants, élue CSE, a également été particulièrement sensible : « Je ne me voyais pas faire du syndicalisme. J’ai eu des problèmes, j’ai pu me confier, j’ai été aidée sans que l’on me demande quoi que ce soit en retour ; il était logique que je m’engage. »
À la confiance on peut ajouter la discrétion et l’efficacité. Un pouvoir d’attraction que la section orange doit principalement à ses pratiques syndicales et à sa culture du dialogue social. « On ne va pas s’installer devant les grilles ou faire une manif pour un oui ou pour un non. On va d’abord se parler, mais on sait se mobiliser quand cela est nécessaire », poursuit Hélène Thouvenin, éducatrice spécialisée et adhérente CFDT depuis 2010.
Parmi les combats de la section, l’extension de l’accord « Ségur de la santé » à leur établissement. Un combat qu’elle a mené, à son échelle, aux côtés de la CFDT Santé-Sociaux, en se mobilisant localement et en multipliant les initiatives et courriers auprès des élus du territoire. À l’origine « oubliés » du dispositif, la plupart des agents des établissements sociaux ont finalement pu bénéficier de la revalorisation de 183 euros net obtenue nationalement par la Fédération Santé-Sociaux en juillet 2022. Ce combat n’est d’ailleurs pas tout à fait terminé. À ce jour, 3 000 agents publics, personnels d’entretien et administratifs, en sont toujours exclus. Dans l’établissement d’Ahuy, une vingtaine d’agents sont concernés. Pour eux, leur pouvoir d’achat et la reconnaissance qu’ils méritent amplement, la section ne lâchera rien !
C’est parce qu’elle est convaincue qu’agir sur le portefeuille répond aux attentes des agents que la section a également négocié, en mai 2025, la réévaluation de la valeur faciale du titre-restaurant (il est passé de 7 à 8 euros). Elle a également obtenu l’ouverture d’une négociation locale relative à la médaille d’honneur du travail et à la prime qui y est associée.
Agir sur les conditions de travail et la qualité de vie au travail
Autre bataille de la CFDT : les conditions de travail et la qualité de vie au travail. Dans un contexte où les effectifs du secteur sont en tension et afin de limiter le taux de rotation du personnel, elle en a fait une priorité. C’est d’ailleurs une nécessité quand il s’agit d’assurer un accueil et un accompagnement de qualité, à la hauteur des besoins des mineurs. Elle s’était déjà battue bec et ongles, il y a une dizaine d’années, pour améliorer le taux d’encadrement et renforcer l’accompagnement et le suivi des mineurs : alors que les unités accueillaient systématiquement douze enfants, elle avait pu faire chuter ce nombre à huit.
Plus récemment, l’équipe a aussi été à l’origine d’un audit sur les difficultés et souffrances vécues par les personnels de certains services. Un travail de deux ans a conduit à la mise en place de modules de formations dédiées : « gestion des comportements violents », « contention verbale », « contention physique », « sanction ». « Les collègues nous ont vus œuvrer pour faire bouger les choses. Nous n’avons pas compté nos heures. On a montré ce que le syndicat pouvait leur apporter, mais aussi que cela ne se faisait pas du jour au lendemain », souligne Hélène Thouvenin.
Un accompagnement sur mesure
En outre, la section a obtenu la titularisation de plusieurs dizaines d’agents et des engagements de la direction en faveur d’une politique volontariste en la matière. Elle propose ainsi aux agents un accompagnement individualisé, que ce soit dans la préparation aux différents concours ou les démarches institutionnelles spécifiques. Ce service sur mesure est « ouvert à tous », précise Christophe Batoux, élu CFDT et présent à la maison départementale de l’enfance depuis 2006. Ensemble, ils vont travailler la lettre de motivation, le CV… et préparer le « grand oral ». Une telle mise en situation rassure avant le jour J et se traduit une fois sur deux en adhésion. « Nos collègues ont bien compris qu’il y avait un vrai plus à rejoindre nos collectifs », affirme Christophe. « Ce que l’on fait ne se résume pas toujours à de grandes avancées visibles par tous, ça peut prendre du temps mais cela témoigne de l’engagement qui est le nôtre auprès de nos collègues », pointe Karine Cordelier.
Entretenir le lien avec les adhérents
Il a d’ailleurs fallu remédier à ce déficit de visibilité. « Nous faisons beaucoup de choses mais nous n’avons pas toujours su valoriser nos résultats, alors que d’autres organisations qui ne font rien savent parfaitement se les approprier », poursuit Vincent Étiève, éducateur spécialisé âgé de 28 ans et élu CSE. Dans cette perspective, la section a peu à peu revu sa façon de communiquer et a désormais acquis le réflexe de valoriser ses actions. Les tracts ont été repensés, la stratégie réseaux sociaux également. Depuis trois ans, la CFDT a mis en place une boucle WhatsApp en vue d’informer, en direct ou dès qu’elle l’estime nécessaire, l’ensemble de ses adhérents. « Nous voulons que nos adhérents puissent avoir la primeur de l’information », insiste Vincent Étiève. « Nous avons nettement progressé en communication mais cela ne remplacera jamais notre présence sur le terrain, complète Valérie Pia. Le premier contact privilégié est et reste la rencontre physique ! »
C’est dans cette logique que la section organise une réunion trimestrielle avec l’ensemble de ses adhérents, pour échanger autour des problématiques locales et nationales. Enfin, elle convie une fois par an l’ensemble des agents à un grand raout, le dernier a eu lieu en janvier 2025 autour d’une galette des rois. S’il est d’abord convivial et festif, ce rendez-vous offre surtout aux membres de la section l’occasion de discuter et de rappeler à toutes et tous que la CFDT est bien vivante, déterminée à faire avancer les droits des agents.