Une CFDT pleine de ressources chez Volkswagen Group France abonné

Implantée depuis 2013 dans la filiale française de Volkswagen, la CFDT a insufflé de nouvelles pratiques syndicales au sein de l’entreprise, au grand dam de la direction. Mais les salariés, eux, s’y retrouvent : en 2017, la CFDT est devenue première organisation syndicale.

Par Claire NillusPublié le 17/08/2018 à 07h25

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« À la CFDT, j’ai rencontré des gens qui avaient la tête sur les épaules », raconte Béatrice Choquez, déléguée syndicale de Volkswagen Group France depuis 2013. Dès son arrivée chez VGF, à Villers-Cotterêts, il y a vingt-trois ans, elle s’intéresse aux activités sociales de l’entreprise et propose son aide. Mais à l’époque, point de section CFDT : FO est l’organisation majoritaire depuis toujours. Comme Béatrice ne se retrouve pas dans ses valeurs, trop catégorielles à son goût, elle se limite à donner un coup de main bénévolement afin de dynamiser l’offre culturelle du comité d’entreprise. Repérée par la DRH pour ses talents d’organisatrice, elle accepte en 2008 un poste de responsable de communication. « C’est en intégrant la direction des ressources humaines que j’ai eu envie de m’impliquer davantage, poursuit Béatrice. Au sein de la DRH, j’ai vu des salariés en souffrance, j’ai travaillé sur des dossiers nouveaux, comme la cogestion [le modèle de relations sociales en vigueur outre-Rhin] ou la mise en place de la gestion prévisionnelle des emplois et des compétences demandée par la maison mère, en Allemagne… Et j’ai découvert certaines pratiques pas très nettes. » Béatrice finit par prendre contact, en 2012, avec le Syndicat CFDT Mines-Métaux de l’Aisne : « De vrais métallos ! », s’amuse-t-elle en évoquant la structure où siègent peu de femmes (seulement deux à la commission exécutive, dont elle). « Mais contrairement aux autres organisations syndicales que j’ai côtoyées chez Volkswagen, je n’ai jamais entendu le moindre propos sexiste, raciste, homophobe ou déplacé de leur part. » Non seulement le courant passe bien, mais Béatrice décide de créer une liste CFDT en vue des élections professionnelles qui approchent. Elle cherche des candidats et repère alors Fabien L., 29 ans, acheteur publicitaire : « C’est le seul jeune qui s’est déplacé pour une réunion sur les retraites proposée par la direction… Je me suis dit : je le veux dans mon équipe ! »

La représentativité gagnée par la CFDT dès 2013


Du nouveau pour susciter des adhésions
Afin d’occuper le terrain et de créer un réseau d’adhérents et de sympathisants, la section CFDT de VGF a misé sur l’événementiel en vue de se faire connaître. Tournois, tombolas, journées à thème : de véritables opérations de communication qui ont récolté un franc succès et permis de voir des salariés qui ne se seraient pas déplacés au local du comité d’entreprise sans cela. « C’est festif, joyeux et fédérateur. “Avec vous, c’est plus dynamique”, nous disent les salariés », se réjouit Fabien L., élu CFDT et trésorier de la section.

Une campagne à plein régime en vue des élections
La section a créé un site internet, une newsletter hebdomadaire, une page Facebook, des enquêtes en ligne. Elle a conçu un huit-pages pour les élections de 2017, avec un bulletin d’adhésion à la fin. « Il y avait des permanences chaque jour, à l’heure du déjeuner, on se relayait. Nous voulions montrer que nous sommes impliqués, pas planqués ! », dit Béatrice Choquez, déléguée syndicale de VGF.

L’union fait la force
Face à une direction qui lui met des bâtons dans les roues, la section CFDT cherche des appuis : d’abord auprès du Syndicat CFDT Mines-Métaux de l’Aisne, mais aussi en multipliant les échanges avec IG Metall (le syndicat de la métallurgie allemande est très présent dans le groupe Volkswagen) et enfin auprès des salariés et des adhérents qui les soutiennent. « C’est dur, mais nos résultats sont nos meilleurs alliés », déclare Béatrice Choquez.

Pour Fabien, cela n’allait pas de soi : « Béatrice a su être convaincante car j’avais une très mauvaise image du syndicalisme et je ne voulais pas du tout y être assimilé. Sauf après avoir entendu parler de la CFDT. Je me suis renseigné car un de mes proches collègues se présentait aux côtés de Béatrice. C’était en 2013, le site de Roissy allait se créer et on ne savait pas trop ce qui nous attendait. Je l’ai suivie. » Souhaitant attirer les jeunes cadres franciliens, VGF, qui est installé dans l’Aisne depuis sa création, en 1960, a en effet décidé en 2013 de créer un second site, plus proche de Paris. Ce nouveau pôle concentre aujourd’hui près de la moitié des effectifs cadres du groupe, soit 250 personnes. « Les élus du personnel de Villers-Cotterêts étaient plutôt âgés, je ne me sentais pas représenté, relève Fabien. J’ai pensé qu’il y avait là une bonne opportunité de négocier sur le télétravail ou la déconnexion, sujets plutôt tabous ici, où la culture du présentéisme est encore très forte. » Dès les élections de 2013, la CFDT gagne sa représentativité avec 26 % des suffrages. Boostée par ce résultat, la jeune section va mettre les bouchées doubles afin d’exister face à FO, toujours en tête avec 34 % des voix.

« Ici, nous sommes dans un cas d’entrave caractérisé », explique Béatrice. Mais la nouvelle section est dans l’œil du cyclone depuis sa création, en 2013. Dès 2014, lorsque le site de Roissy-en-France a été opérationnel, Béatrice y a été mutée et rétrogradée sur un poste moins bien rémunéré. Le local syndical, lui, est resté à Villers-Cotterêts, ce qui l’oblige à faire des allers-retours incessants pour rencontrer les militants… Quatre ans plus tard, à la veille des élections de 2017, la CFDT n’a qu’un seul panneau d’affichage à Villers et un à Roissy, très peu visible. La direction a fait fermer le site internet que la section avait créé puis l’espace intranet dont elle disposait. L’hiver dernier, par – 5 °C, les militants ont tracté devant l’entrée du site, tandis que les autres organisations syndicales déposaient tranquillement leurs piles de tracts sur les tables devant les machines à café. « Qu’à cela ne tienne ! Nous…

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