“Nous sommes le premier rempart face à la direction”

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icone Extrait de l'hebdo n°3978

Non-respect des instances représentatives du personnel, absence d’agenda social, dialogue social en panne : en dénonçant un à un les manquements de leur administration, les militants CFDT de Montpellier Méditerranée Métropole gagnent petit à petit la confiance des agents.

Par Claire NillusPublié le 16/09/2025 à 12h00

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© Syndheb

La métropole de Montpellier rassemble 500 000 habitants répartis dans 31 communes. Autour de la ville centre et ses 300 000 habitants, elle inclut une grande diversité de territoires, du plus urbain au plus rural, et emploie 3 300 agents qui travaillent un peu partout. La CFDT y est la troisième organisation syndicale depuis 2022 (elle était quatrième en 2018), devant SUD (actuelle quatrième), derrière FO (deuxième) et l’Unsa (première). « Mais l’Unsa plafonne depuis quelques années – et l’écart se réduit avec FO, qui nous devance seulement de trente voix », précise Patrice Lorthiois, secrétaire de la section CFDT. Dans cette collectivité, la CFDT, « c’est le syndicat qui n’a pas peur, qui monte au front » et qui est moteur de l’intersyndicale quand il le faut.

« Nous sommes les seuls à dénoncer publiquement l’absence de dialogue social au sein de la collectivité », poursuit Stéphane Fabre, le secrétaire adjoint de la section. Absence de dialogue social, voire négation totale de celui-ci tant les instances paritaires semblent ignorées par la direction en place depuis 2020. « La notion de dialogue social se réduit à des propositions par l’administration aux organisations syndicales pour avis », résument les deux militants, qui déplorent également l’absence d’agenda défini autour des questions devant être débattues chaque année. « Nous sommes la troisième organisation syndicale en matière de représentativité mais, par nos actions, le premier rempart face à la direction », assurent-ils.

Car la section multiplie les alertes par tous les moyens : auprès des agents avec qui elle communique beaucoup, via la boîte mail professionnelle (vue par les agents comme « un vrai plus »), avec le soutien des adhérents, en déposant un recours chaque fois qu’il existe un vice de forme. À ce jour, il y en a huit en cours d’instruction, presque tous pour non-consultation du comité social territorial (CST).

Des débats qui n’ont pas eu lieu

Le premier recours gracieux a été déposé par la CFDT lorsque la direction a présenté en conseil communautaire son plan de lutte contre l’absentéisme… sans l’avoir au préalable mis en débat en CST. « La direction a refusé de nous écouter pour pouvoir appliquer sa franchise maladie », explique Patrice. À partir du 1er janvier 2023, en cas d’arrêt maladie, les agents étaient ponctionnés d’une part de leur revenu pouvant représenter jusqu’à un tiers de leur salaire. Sous la pression de trois organisations syndicales emmenées par la CFDT, la mesure a finalement été retirée en avril 2025.

« Mais même sur un sujet moins clivant comme le plan de lutte contre les discriminations, nous ne sommes pas consultés ! », s’agacent les militants. « Nous sommes évidemment d’accord avec ce plan sur le fond. Mais nous demandons au président et à son directeur général des services de respecter la procédure et le débat démocratique. » Ainsi, sur la rémunération des astreintes, la réorganisation des bureaux en open space, la mise en place de la semaine de quatre jours ou les mesures de protection des agents, les recours s’accumulent, toujours pour non-consultation du CST. « Nous attendons le retour du tribunal administratif sur tous ces dossiers. »

Un bilan du télétravail effectué par la section

Sans plus de concertation avec les organisations syndicales, l’organisation du télétravail fait également partie des sujets qui fâchent. Depuis 2021, la CFDT déplore que son déploiement ne tienne pas compte des tâches éligibles au télétravail, tenant à l’écart un certain nombre d’agents qui pourraient en bénéficier. Après quatre années sans aucun bilan effectué par l’administration, la section CFDT a fini par lancer sa propre enquête. Outre une étude fine des activités télétravaillables qui n’a pas eu lieu, elle relève que la règle des deux jours de télétravail pour tous n’est pas appliquée partout (ce qui engendre une forme de discrimination) et réclame un forfait télétravail… que la direction refuse de mettre en place. Récemment, les militants ont tout de même noté un changement de méthode de la part de la direction. Cette dernière les a consultés à propos d’un questionnaire qu’elle veut diffuser auprès des agents au sujet du télétravail. « Cela nous a surpris puisque nous sommes en général mis devant le fait accompli. Il semblerait que notre initiative l’ait inspirée », notent-ils.

La section est aussi très attentive à la mise en place, depuis janvier 2025, de la semaine de quatre jours sans réduction du temps de travail. L’administration l’a présentée comme une expérimentation, mais sans aucun cadre ni délai. En réalité, elle a laissé la main aux managers. « Là non plus, la F3SCT [formation spécialisée en santé, sécurité et conditions de travail] n’a pas été consultée, alors que cette organisation de travail peut avoir des répercussions sur la santé et la sécurité des agents », fulmine Patrice.

Une fois de plus, la CFDT réclame une analyse sérieuse portant sur les conséquences de cet aménagement du temps de travail ainsi qu’une étude d’impact sur le passage en force à l’open space dans tous les pôles de l’établissement. « Tout cela est contre-productif et génère un profond ressentiment des agents vis-à-vis de l’institution et des élus », regrette les militants. De plus en plus d’indicateurs de mal-être au travail sont perceptibles tandis qu’aucune enquête sur les risques psychosociaux n’a été menée et que l’établissement n’a toujours pas rédigé son Duerp, ce document unique d’évaluation des risques professionnels pourtant obligatoire.

Plus 10 % d’adhésions chaque année

À propos de l'auteur

Claire Nillus
Journaliste

Mais parce qu’elle est déterminée et affiche clairement ses positions, la CFDT engrange chaque année des adhésions depuis le début de la mandature, et ce, dans une collectivité faiblement syndiquée (15 % des agents seulement). La CFDT Métropole, qui n’avait qu’un seul représentant en instances en 2018, en a cinq depuis 2023. Comme quoi, s’engager véritablement pour la défense des agents, ça rapporte… Lors des prochaines élections professionnelles, la section CFDT nourrit l’ambition de devenir un opposant encore plus représentatif afin de pouvoir créer un véritable rapport de force avec l’employeur.