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Extrait de l'hebdo n°3988
La décision du tribunal de Strasbourg constitue un nouveau coup dur pour les salariés de NovAsco : trois de ses quatre sites français sont liquidés, provoquant la suppression de près de 550 emplois. Les salariés, soutenus notamment par la CFDT, attaquent en justice la direction du groupe.

Pas de happy end pour les salariés du sidérurgiste NoVasco (ex-Ascometal). Le 17 novembre 2025, le tribunal de commerce de Strasbourg a annoncé la liquidation judiciaire de trois des quatre sites français du groupe spécialisé dans la fabrication d’aciers spéciaux (notamment pour l’automobile). Seul Leffrinckoucke (Nord / Hauts-de-France), à proximité de Dunkerque, est repris par un consortium dirigé par la PME ardennaise Métal Blanc. Sur les 776 emplois, près de 550 vont être supprimés – dont 450 pour le seul site d’Hagondange, le plus touché. Les syndicats dénoncent un nouveau revers pour la sidérurgie française, déjà fragilisée par la concurrence étrangère, les coûts énergétiques élevés et la crise du secteur de l’automobile.
Mauvais message pour l’acier décarboné
« C’est un pan de la sidérurgie qui tombe ; je dirais un de plus. Et c’est un mauvais message envoyé à tous ceux qui investissent dans la décarbonation », déplore Christèle Khelf, secrétaire générale adjointe de la CFDT Métallurgie. De fait, l’aciérie d’Hagondange n’est pas un outil industriel ordinaire. Dotée d’un four électrique, elle incarnait une possibilité d’acier décarboné, stratégique dans le cadre de la transition énergétique. Sa disparition est non seulement un drame humain mais aussi un non-sens écologique et stratégique. « À la FGMM1, nous soutenions une nationalisation provisoire du site, le temps de trouver un repreneur et ainsi préserver l’outil industriel et les compétences humaines. »
Des salariés mobilisés contre Greybull
Sur le terrain, une bataille judiciaire se profile désormais. Le ministre délégué chargé de l’Industrie, Sébastien Martin, a annoncé son intention de poursuivre le fonds d’investissement britannique Greybull Capital, propriétaire de NovAsco depuis 2024. Selon l’intersyndicale de NovAsco (CFDT, CGT et CFE-CGC), les salariés licenciés pourraient se joindre à cette action. Dans un courrier du 21 novembre, elle leur rappelle que Greybull s’est engagé, dans un accord conclu avec l’État, à apporter 90 millions d’euros au groupe, dont 15 millions en fonds propres. Or seul 1,5 million d’euros a été versé, laissant un manque de 13,5 millions. « Par deux fois, les salariés de NovAsco ont demandé à Greybull Capital de tenir ses engagements, par deux fois, [la société d’investissement britannique] a refusé », rappelle les syndicats.
« Si Greybull Capital avait apporté les fonds promis, NovAsco aurait eu plus de liquidités [ce qui aurait notamment augmenté les fonds disponibles pour le PSE] et Greybull Capital aurait eu une incitation plus forte à trouver des solutions plutôt qu’à laisser la société sombrer en redressement judiciaire puis en liquidation [pour la partie non reprise] », indique le courrier qui demande aux salariés licenciés de se joindre à l’action judiciaire visant à faire reconnaître le « comportement fautif » du fonds et se faire indemniser en conséquence.
Conditionnalité des aides publiques
« Je pense qu’il est important qu’un gouvernement qui donne des aides publiques puisse demander des comptes, contrôler ce qui a été dépensé, et pourquoi les engagements n’ont pas été pris. Si les engagements n’ont pas été pris, il faut que les entreprises remboursent cet argent, a réagi Marylise Léon. Les aides publiques ne doivent pas être un permis de dilapider. » La secrétaire générale de la CFDT réclame que les soutiens financiers soient strictement encadrés par des engagements vérifiables. « Au bout du bout, ce sont les salariés qui trinquent ! »