Hong Kong : la répression syndicale passe les frontières

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iconeExtrait de l’hebdo n°3882

Début juillet, les autorités hongkongaises ont émis huit mandats d’arrêt internationaux à l’encontre de militants pro-démocratie exilés. Christopher Mung, ancien leader de la HKCTU, figure parmi les militants visés. Une nouvelle étape dans la reprise en main de Hong Kong.

Par Anne-Sophie Balle— Publié le 11/07/2023 à 12h00

En octobre 2021, lorsque les membres du comité exécutif de la Hong Kong Confederation of Trade Unions (HKCTU) ont été contraints de voter l’autodissolution…
En octobre 2021, lorsque les membres du comité exécutif de la Hong Kong Confederation of Trade Unions (HKCTU) ont été contraints de voter l’autodissolution…© Tsz Yuk Alex Chan/Sopa Images/Zuma/RÉA

Levée de boucliers. Au lendemain des mandats d’arrêt émis par les autorités de Hong Kong contre huit opposants exilés, avec à la clé une récompense d’un million de dollars hongkongais (120 000 euros) pour quiconque contribuerait à leur arrestation, les voix s’élèvent et dénoncent une traque aux militants pro-démocratie au-delà des frontières. « Un dangereux précédent » qui « menace les libertés fondamentales de personnes partout dans le monde », s’alarment plusieurs pays.

Parmi les militants visés, Christopher Mung. Syndicaliste et directeur de l’Observatoire des droits des travailleurs de Hong Kong, il fut l’un des leaders de la HKCTU (Confédération des syndicats de Hong Kong) – contrainte à l’autodissolution, comme 175 autres syndicats hongkongais. Christopher, en exil depuis 2011, est aujourd’hui visé par ce mandat d’arrêt au motif d’« incitation à la sécession ». La CFDT, particulièrement préoccupée, dénonce une « chasse aux activistes pro-démocratie » dans un communiqué.

Une loi pour étouffer la contestation de 2019

C’est la première fois que de tels procédés sont mis en place depuis la promulgation de la loi de sécurité nationale de 2020. Imposée par Pékin afin d’étouffer la contestation populaire et les mouvements pro-démocratie qui ont secoué Hong Kong en 2019, cette loi menace de peines (pouvant aller jusqu’à la perpétuité) toute personne accusée de terrorisme, sécession, subversion ou collusion avec des forces étrangères… Des accusations aussi larges que floues, mais qui ont comme conséquence un lourd bilan pour le HKCTU : arrêtés, Lee Cheuk Yan et Carol Ng (respectivement secrétaire général et présidente de la HKCTU) purgent actuellement une peine de prison à cause de leur participation aux mouvements de 2019.

« La volonté déclarée du gouvernement de Hong Kong d’utiliser la loi sur la sécurité nationale de manière extraterritoriale pour cibler des dissidents marque un tournant », estime Béatrice Lestic, secrétaire nationale CFDT en charge de l’international. En effet, si les mandats d’arrêt annoncés n’ont en soi pas de portée sur le plan international (la majorité des pays vont les ignorer), cet événement significatif reste un « avertissement envoyé aux défenseurs de la démocratie [et] qui vise à terroriser ses ressortissants, même en exil », s’inquiète-t-elle.

Aussi, la CFDT réaffirme-t-elle son soutien à Christopher Mung et réitère son appel à la libération des syndicalistes emprisonnés. Plus largement, elle appelle les autorités françaises à interpeller les autorités de Hong Kong pour qu’elles respectent leurs engagements internationaux, à commencer par la Convention 87 de l’Organisation internationale du travail sur la liberté syndicale. Liberté dont sont aujourd’hui ouvertement privés les Hongkongais, et qui entraîne chaque jour un peu plus la ville et sa population dans un glissement autoritaire, vingt-six ans après la rétrocession de l’ancienne colonie britannique à la Chine.