Deux mois passés au plus près des saisonniers

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iconeExtrait de l’hebdo n°3885

Dans les champs de melons de Nouvelle-Aquitaine, sur les plages des Hauts-de-France, dans les campings d’Auvergne-Rhône-Alpes ou aux abords du Festival interceltique de Lorient, la CFDT a rencontré, pour la 25e fois, les travailleurs saisonniers et les a informés de leurs droits. Un rendez-vous incontournable… et l’opportunité de prolonger la dynamique de développement observée depuis le mouvement des retraites.

Par Guillaume Lefèvre— Publié le 29/08/2023 à 12h00

Cet été, des militants CFDT ont rencontré bon nombre de saisonniers (ici, au bord d’un champ de melons de la Vienne) pour les informer de leurs droits et répondre à leurs questions…
Cet été, des militants CFDT ont rencontré bon nombre de saisonniers (ici, au bord d’un champ de melons de la Vienne) pour les informer de leurs droits et répondre à leurs questions…© Syndheb

« Une campagne saisonniers, c’est un moment important pour tout le monde, tant pour les militants que pour les travailleurs, résume Lydie Nicol, secrétaire nationale de la CFDT en charge de la 25e campagne saisonniers de la CFDT, sur le point de s’achever. Après plusieurs mois de mobilisation au sujet des retraites, cette opération aura offert aux militants l’occasion de se retrouver et de passer ensemble un moment convivial. Enfin, il était important que les travailleurs nous voient hors les murs de l’entreprise – particulièrement les plus jeunes, qui en sont parfois à leur première expérience professionnelle. » Cette année, des centaines d’opérations ont été organisés sur tout le territoire national. Plusieurs milliers de travailleurs ont pu discuter, échanger et parfois adhérer à la CFDT. « La campagne saisonniers n’est plus seulement une campagne d’information, c’est aussi une campagne d’adhésions », affirme Lydie Nicol. Ainsi, pendant la période juillet-août 2023, plus de 9 000 adhésions en ligne ont eu lieu.

Une présence CFDT tellement utile

« C’est vraiment bien que vous veniez nous rencontrer, témoigne Laure, 27 ans, saisonnière dans un camping du côté de Thiers (Puy-de-Dôme/Auvergne-Rhône-Alpes). Il y a beaucoup de sujets un peu tabous, beaucoup de choses que l’on ne sait pas ou qu’on ne connaît pas forcément. C’est utile de pouvoir identifier des interlocuteurs et savoir que l’on peut poser des questions et obtenir des réponses si on en a besoin. C’est rassurant. Je ne connaissais pas du tout les syndicats, je n’ai pas vraiment d’idées sur ce qu’ils font, ce n’est pas dans mon radar ni dans mon entourage. Mais, maintenant, je sais à qui m’adresser ! »

Logement, rémunération, heures supplémentaires, transports… : les interrogations ne manquent pas, évidemment. À l’instar de Laure, plusieurs milliers de travailleurs ont pu rencontrer la CFDT et échanger avec ses représentants. « Encore une fois, les militants ont mouillé le maillot », insiste Lydie Nicol.

Tous les secteurs professionnels se sont mobilisés, et ce, dans toutes les régions. La CFDT-Cheminots a ainsi sillonné les grandes gares parisiennes à la rencontre des embauchés estivaux. « On a ressenti de l’intérêt. Pour beaucoup de travailleurs, cette première expérience professionnelle s’accompagne souvent d’une méconnaissance de leurs droits. Nombre d’entre eux ne se posent d’ailleurs pas de questions à ce sujet. Grâce à nous, ils découvrent qu’ils en ont ! », témoigne Vanessa Lhomme, de la CFDT-Cheminots. À Fort-Mahon-Plage (Somme/Hauts-de-France), il était difficile de passer à côté du barnum CFDT et de son château gonflable installé sur le front de mer, le 8 juillet dernier. Et impossible de passer à proximité sans entendre cette question : « Ça vous dit de découvrir ce que fait la CFDT ? Avec l’adhésion découverte, c’est possible ! » Chacun des quarante militants présents ce jour-là a fait passer le message.

Marylise Léon, la secrétaire générale de la CFDT, était présente lors de l’action saisonniers du 8 juillet dernier à Fort-Mahon-Plage.
Marylise Léon, la secrétaire générale de la CFDT, était présente lors de l’action saisonniers du 8 juillet dernier à Fort-Mahon-Plage.© Syndheb

Les uns sillonnaient les bars et restaurants de la cité balnéaire, les autres informaient les parents le temps que leurs enfants profitent de la structure gonflable en accès libre, mise à disposition par la CFDT. « Nous avons ainsi pu échanger avec près de 300 personnes, détaille Alexandre Boutte, secrétaire régional chargé de l’opération. Les gens viennent peut-être plus facilement vers nous, car le mouvement des retraites nous a donné une image nouvelle. » Parmi ces dernières, des saisonniers, donc, mais aussi des parents et grands-parents venus se renseigner pour leurs enfants ou petits-enfants. Bon nombre de passants sont repartis avec des lunettes, sacs et éventails estampillés CFDT, sans oublier l’indispensable carte contact ; certains d’entre eux sont d’ailleurs revenus rapidement puisque la CFDT organisait et offrait un concert à la ville et aux vacanciers le soir même.

Le terrain, ça finit toujours par payer !

Du côté de Lencloître (Vienne), la CFDT de Nouvelle-Aquitaine a tracté aux abords des champs de melons. La particularité d’une partie de ces documents, c’est qu’ils sont rédigés en bulgare. « Une majorité de travailleurs viennent de ce pays, témoigne Christophe Rabussier, secrétaire général de l’Union départementale CFDT de la Vienne. Ils sont surpris mais contents de nous voir… et de trouver des informations dans leur langue ! » Au menu des discussions : salaire, logement, paiement des heures supplémentaires, etc. Un exercice auquel les militants viennois sont rompus depuis plusieurs années.

1. Union régionale interprofessionnelle.

Les militants du Grand Est ont eux aussi décidé de revenir dans des lieux qu’ils connaissent bien : ils étaient présents sur les berges des lacs de Madine (Meuse), d’Orient (Aube) et du Der-Chantecoq (Marne et Haute-Marne) les 12, 13 et 14 juillet. « La machine est bien rodée car les gens sont maintenant habitués à nous voir et nous attendent », explique Sylvie Delanne, secrétaire régionale de l’URI1. Une tombola organisée durant l’action a permis de multiplier les contacts et de récupérer moult numéros de téléphone et adresses électroniques. « Nous considérons que c’est le travail répétitif qui paie, déclare Valérie Guillaume, secrétaire régionale de la CFDT d’Auvergne-Rhône-Alpes. Voilà maintenant dix ans que la CFDT fait étape à Murol et Saint-Nectaire [Puy-de-Dôme], Vichy [Allier] ou encore Le Lioran [Cantal]. On est clairement identifiés par les travailleurs et les employeurs. Ça facilite les choses. L’accueil est souvent très bon, et les salariés nous disent merci. »

La CFDT-Bretagne a elle aussi ses rendez-vous incontournables de l’été. « Je vous ai vu à Port-Louis [Morbihan] la semaine dernière », lance un saisonnier venu spontanément à la rencontre des militants CFDT présents au Festival interceltique de Lorient, le 9 août – un rendez-vous où se pressent près d’un million de visiteurs, et donc des milliers de saisonniers. « Vous faites quoi exactement ? interpelle une étudiante de 17 ans accompagnée de sa petite sœur. Je ne travaille pas encore, mais ça m’intéresse. »

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© DR

Le “sujet saisonniers”, c’est toute l’année !

Présente pour la cinquième fois lors de l’évènement breton, Caroline Guyodot, secrétaire de l’Union de pays lorientais, rappelle que le « sujet saisonniers », c’est toute l’année. Elle participe d’ailleurs à un groupe de travail logement saisonniers réunissant les départements, les collectivités, l’État et les employeurs. Sans surprise, la question du logement dans le département du Morbihan constitue un véritable casse-tête pour ces travailleurs qui font la saison. « Ils sont très nombreux à dormir dans leur voiture… On arrive quand même à faire bouger les choses, petit à petit », explique Caroline. Et de prendre l’exemple d’une interpellation adressée aux élus du territoire l’année dernière. « On avait constaté que le dernier bus reliant Larmor-Plage à Lorient partait à 21 h 30, bien trop tôt pour les travailleurs. Cette année, le service a été prolongé. » La militante enchaîne sur cet autre exemple : un saisonnier rencontré plusieurs années auparavant est désormais adhérent à la CFDT. « Il nous a parlé de la situation dans son établissement, où les heures des salariés explosent – jusqu’à 60 heures par semaine – et où le paiement se fait de la main à la main. Ça nous a permis d’interpeller l’inspection du travail… »

À propos de l'auteur

Guillaume Lefèvre
Journaliste

Même si les droits des travailleurs saisonniers semblent être de mieux en mieux respectés au fil des années, ce genre de pratiques reste monnaie courante pendant la saison estivale. Il est donc impossible de baisser la garde. Décidément, les campagnes saisonniers de la CFDT ont encore de beaux jours devant elles !