Plan social chez Fleury Michon : la CFDT obtient un congé de reclassement

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iconeExtrait de l’hebdo n°3880

Fleury Michon a décidé de fermer son site de Plélan-le-Grand (Ille-et-Vilaine/Bretagne), entraînant le licenciement d’une centaine de personnes. L’équipe CFDT a pu bénéficier d’un accompagnement solide pour engager le bras de fer avec la direction.

Par Fabrice Dedieu— Publié le 27/06/2023 à 12h00 et mis à jour le 27/06/2023 à 12h11

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© Jean-Claude Moschetti/RÉA

La première mauvaise nouvelle est arrivée le 27 octobre 2022 : la direction de Fleury Michon a annoncé ce jour-là vouloir mettre en vente son usine de Plélan-le-Grand. Sur ce site, une centaine de salariés produisent jambons et jambonneaux ainsi que de la mousse de canard. « Ils ont mis en avant des raisons économiques, la grippe aviaire, le Covid », explique Lionel Goltais, délégué syndical CFDT, syndicat majoritaire. Il a travaillé vingt-quatre années dans cette usine. Si Fleury Michon connaît des difficultés, « le site en lui-même était viable », précise Olivier Louchard, secrétaire générale du Syndicat général agroalimentaire d’Ille-et-Vilaine (SGA 35). Et Lionel d’ajouter : « En 2022, nous avons réalisé notre deuxième meilleur tonnage depuis 2014. »

1. Comité social et économique.

Les semaines passent et la deuxième mauvaise nouvelle arrive dans le courant du mois de février 2023 : la direction annonce la fermeture. « Pendant plusieurs semaines, ils ont fait espérer les salariés. Il y a eu des visites, mais la direction n’a rien voulu nous dire », déclare avec amertume Audrey Berthier, élue au CSE1, adhérente CFDT et conductrice de ligne depuis treize ans chez Fleury Michon. Le syndicat prend alors les choses en main : « Dès que la vente a été annoncée, nous avons décidé de mettre en place une cellule de crise en accord avec la CFDT-Agri-Agro ; il y a eu une première réunion avec Syndex (déjà chargé de l’expertise comptable), Catalys (pour les ressources humaines) et LBBa (pour le juridique). On se doutait qu’une direction comme Fleury Michon allait profiter de la présence d’élus ayant peu d’expérience », précise Olivier Louchard, Lionel ayant été nommé délégué syndical il y a seulement deux ans.

De gauche à droite : Audrey, Olivier et Lionel.
De gauche à droite : Audrey, Olivier et Lionel.© URI Bretagne

Bras de fer avec la direction

2. Plan de sauvegarde de l’emploi.

Les craintes d’Olivier se révèlent fondées : la direction de l’usine souhaite aller vite en ce qui concerne la négociation du PSE2 pour le boucler en un mois et demi : « Grâce à la fédération, nous nous sommes mis en lien avec la DRH du groupe pour dénoncer ces pratiques et les menacer de salir leur nom dans les médias s’il n’y avait pas un PSE “humain”. Les salariés, avec Lionel et Audrey, sont même allés manifester leur mécontentement devant les fenêtres de la maison mère. » La direction des ressources humaines du groupe calme le jeu, les élus CFDT obtiennent la possibilité de recourir aux services d’un avocat du cabinet LBBa durant toute la négociation. Syndex les accompagne également en leur donnant des éléments, notamment dans le domaine de l’emploi – et la possibilité d’en retrouver un facilement ou non. « Il fallait, indique Olivier Louchard, pendant les réunions, avoir des arguments. Laurent Beziz, l’avocat de LBBa, a permis de faire avancer les choses, car le PSE proposé à l’origine n’était pas dans les clous. » Catalys intervient aussi à travers une cellule d’écoute.

Les militants CFDT sont venus en nombre lors d’un rassemblement, le 15 mars dernier, devant l’usine de Plélan-le-Grand.
Les militants CFDT sont venus en nombre lors d’un rassemblement, le 15 mars dernier, devant l’usine de Plélan-le-Grand.© DR

Un accord est finalement trouvé au début mai. Il prévoit un congé de reclassement de douze mois pour les salariés, les employés et les agents de maîtrise, de sept mois pour les techniciens et de six mois pour les cadres (dont la rémunération correspond à 80 % du salaire brut). Si un salarié retrouve un emploi avant la fin du congé de reclassement, la durée restante du congé est payée à 65 %. Une mesure obtenue par la CFDT. Et si une formation dure plus longtemps que la durée du congé de reclassement, la période non couverte par le congé est payée à 65 %. Les salariés toucheront, outre l’indemnité de licenciement, 23 000 euros (pour les ouvriers et les employés), 16 000 euros (pour les techniciens) ou 13 000 euros (pour les cadres). Ceux qui cumulent moins de cinq ans d’ancienneté, toutes catégories confondues, toucheront 7 000 euros. « À l’origine, l’entreprise ne proposait que 4 000 euros par personne, et pour tous », tient à rappeler Olivier Louchard. Au total, le PSE coûtera à l’entreprise 7 millions d’euros.

Une section proche de son syndicat

Les militants louent l’accompagnement dont ils ont bénéficié de la part de Syndex, LBBa et Catalys. « Ces acteurs connaissent parfaitement le fonctionnement du secteur agroalimentaire, ils sont présents dans les entreprises et se servent de cette expérience, souligne Olivier Louchard. Aussi, nous avons pu être réactifs car la section, bien que de taille réduite, est proche du syndicat. Il faut que les délégués syndicaux soient proches de leur syndicat, car chez Fleury Michon, si Lionel et Audrey avaient été seulement tous les deux, la direction n’aurait pas fait de détail ! »

À propos de l'auteur

Fabrice Dedieu
Journaliste

Désormais, le PSE doit être validé ou non par l’inspection du travail. « C’est une période difficile qui se termine, ça a été dur », affirment les deux militants de Fleury Michon. « Ça a demandé de gros efforts, mais la majorité des salariés est satisfaite », conclut Olivier Louchard.