La CFDT s’est imposée dans cette enclave du territoire britannique en France. Pour le plus grand bien des salariés qui ont vu leurs CDD d’usage transformés en CDI, et le droit du travail gagner du terrain au fil des années.

Le local syndical contraste avec la façade imposante du British Council France, ancien hôtel particulier situé sur l’esplanade des Invalides à Paris. C’est pourtant dans cet entresol exigu donnant sur cour que l’équipe syndicale a plaisir à se réunir. Un mug de café à la main, Louisa Dunne évoque avec ses collègues le sujet qui est actuellement dans tous les esprits : quelle issue au Brexit ? À quelques jours du 31 octobre, nul ne peut le prédire. Les deux tiers des salariés du British Council sont des ressortissants britanniques. « Ceux qui pouvaient demander la nationalité française ou d’un autre État de l’Union l’ont fait dans les mois qui ont suivi le référendum, précise Louisa Dunne, déléguée syndicale. Nous avions négocié un tarif de groupe avec un traducteur assermenté de façon à aider les salariés à faire traduire leurs documents d’état civil. » L’impact du Brexit sur l’activité même du British Council reste difficile à évaluer. Cette institution chargée d’assurer le rayonnement culturel et l’enseignement de la langue anglaise compte des antennes partout dans le monde. « Si la plupart des enseignants sont recrutés en France, certains viennent des autres centres du British Council », explique Louisa.
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Dans chaque pays d’implantation du British Council, c’est le droit social national qui s’applique. L’antenne française n’échappe pas à la règle. Il a cependant fallu une bonne dose d’acharnement pour faire accepter aux directions successives un dialogue social digne de ce nom. Pendant une longue période, le poste de directeur du British Council, à Paris surtout, représentait une gratification de fin de carrière. « Nous avons connu des dirigeants qui ne respectaient pas le droit social français », témoigne Louisa.
Premier enjeu : sécuriser l’emploi
En 2011, aucun syndicat n’est présent au British Council. Pas de comité d’entreprise dans cette entreprise dont l’effectif dépassait déjà largement le seuil de 50 salariés. Louisa et quelques collègues désireux d’améliorer leurs conditions de travail contactent le Syndicat parisien de l’enseignement privé (Spep-CFDT), fondent la section, organisent les élections et remportent tous les postes de la délégation unique du personnel (DUP). « Louisa m’avait expliqué les difficultés rencontrées au British Council, raconte Juan-Carlos Canales, alors responsable du développement du Spep. Sur un effectif de 300 salariés, 150 enchaînaient des CDD d’usage, le record ayant été atteint par un salarié qui cumulait douze ans de CDDU. Cela entraînait beaucoup d’insécurité et de précarité chez les salariés. » La situation est emblématique du secteur de l’enseignement privé hors contrat, selon Juan-Carlos, délégué syndical de l’Alliance française, l’équivalent français du British Council. La proximité professionnelle et la similitude des situations rencontrées vont lui permettre de guider utilement les premiers pas de la jeune section : « Louisa a réalisé un sondage auprès des salariés dont les conclusions montraient une aspiration à davantage de sécurité dans l’emploi. »
Quatre accords coup sur coup
Entre-temps, la direction de l’établissement a été renouvelée. Les dirigeants sont plus attentifs, « plus professionnels », selon Louisa, et acceptent d’ouvrir une négociation. Le budget alloué au titre de la DUP permet à l’équipe de solliciter les conseils d’un membre du réseau d’avocats Avec, partenaire de la CFDT. Me Adrien Brousse les aide à se familiariser avec les subtilités du droit social français. « Le travail de la section a permis de passer d’un statut du personnel unilatéral, qui avait été imposé par la direction, à un statut collectif négocié, plus stable pour les salariés, estime Me Adrien Brousse. Ils se sont inspirés de la convention collective de l’enseignement privé hors contrat (devenu enseignement indépendant), plus avantageuse, mais dont ils ne pouvaient pas directement relever. »
Dans ce cadre, pas moins de quatre accords sont signés en 2014, qui portent sur les conditions de travail, la durée et le temps de travail, le temps partiel annualisé (les enseignants avaient déjà vu leur situation évoluer grâce à un tel accord signé dès 2011) et l’organisation du travail des examinateurs et des surveillants d’examen. « L’équipe prenait conseil auprès de Me Brousse, et de mon côté je les aidais à identifier les ressorts de la négociation et éviter les pièges », explique Juan-Carlos. Ces accords signent la fin des CDD d’usage, transformés en CDI à temps partiel annualisé afin de concilier une part de flexibilité pour l’employeur et davantage de stabilité pour les salariés. Les enseignants voient désormais leur temps de préparation de…