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Extrait de l’hebdo n°3892
À Sarcelles, une soixantaine d’Atsem (agents territoriaux spécialisés des écoles maternelles) et de personnels de cantine des écoles maternelles et élémentaires de la ville se sont mobilisés fin septembre pour demander une meilleure reconnaissance salariale.

Ce n’est pas une pluie, même battante, qui pouvait doucher leur détermination. Menées par Florise Castard, responsable de la section CFDT, Laurencia, Walia et leurs collègues des écoles maternelles et primaires de Sarcelles ont sorti parapluies et chasubles orange le 21 septembre dernier.

1. Le 6 octobre 2022, les Atsem de Sarcelles (et le personnel de crèche) avaient déjà été appelées à faire grève pour demander une meilleure reconnaissance de leur métier (lire CFDT Magazine no 488, déc. 2022).
Devant l’hôtel de ville, elles ont dénoncé haut et fort leurs conditions de travail et le manque de reconnaissance de leurs métiers1. Au total, 16 écoles sur 19 se sont retrouvées sans Atsem, et un bon nombre d’entre elles sans personnels de cantine. Au fil des années, les Atsem ont vu leur rôle s’accroître et leurs tâches se multiplier. Elles (la profession est très féminisée) sont présentes pendant le temps scolaire ; elles complètent l’action des enseignants, veillent à la sécurité et à l’hygiène des enfants, les surveillent pendant la sieste… Sur le temps périscolaire, elles assurent l’entretien des locaux, l’accueil du matin et du soir. À l’instar du personnel de cantine, elles dépendent de la commune qui les emploie et ne bénéficient pas du régime indemnitaire plus favorable de l’Éducation nationale.
Valorisation du travail, reconnaissance de la pénibilité
2. Dans la fonction publique territoriale, la collectivité fixe librement les plafonds des deux parts du régime indemnitaire – l’indemnité de fonctions, de sujétions et d’expertise (IFSE) et le complément indemnitaire annuel (CIA) – et les critères d’attribution.
À Sarcelles, beaucoup sont vacataires depuis des années, ce qui rend leur situation professionnelle précaire. Ce 21 septembre, la demande de revalorisation du régime indemnitaire IFSE2 était donc inscrite sur toutes les pancartes. « Nous avons aussi un problème d’équité entre les services » explique Florise, les plus féminisés regroupent les personnes les moins bien payées. Autre revendication : « qu’il soit mis fin aux contrats précaires. Certaines d’entre nous sont vacataires depuis 2011, c’est-à-dire qu’elles ne sont pas payées quand elles ne travaillent pas, notamment pendant les vacances scolaires ! ».
3. Accompagnants d’élèves en situation de handicap (AESH).
Les équipes dénoncent également leurs conditions de travail. Après plusieurs années d’exercice, à force de s’agenouiller et de porter les enfants, de nombreuses Atsem souffrent de troubles musculosquelettiques. Elles sont opérées des mains et/ou des épaules avant d’être reclassées sur des postes plus administratifs ; elles sont aussi mentalement épuisées. En cause, un management toxique dans certains établissements, et des enfants « de plus en plus difficiles ». « Normalement, l’Éducation nationale installe dans les classes des AESH3 pour s’occuper des enfants en situation de handicap ou qui sont sujets à des troubles du comportement », explique Florise. Mais à Sarcelles, elles manquent. Ce sont ainsi les Atsem qui en ont la charge, au détriment de leurs propres missions.
« De plus en plus d’enfants souffrent de troubles autistiques, sont hyperactifs, constate Laurencia, Atsem à Sarcelles depuis 2004. Nous ne sommes pas formées pour les accueillir. » L’an dernier, une de ses collègues a été victime de deux accidents du travail et s’est fait mordre en classe par un enfant. « La personne concernée ne sait pas forcément comment réagir, ce qui crée des tensions avec l’équipe éducative », s’inquiète Florise. « On voit des agents craquer. Certains s’arrêtent pour dépression, alerte Walia, Atsem à Sarcelles depuis dix ans. Le maire nous propose de nous former pour bénéficier d’une protection fonctionnelle, mais ce n’est pas notre métier ! »
Des personnels entendus
À la suite de la grève, des avancées ont pu être actées avec la mairie. La CFDT a notamment obtenu la mise en œuvre d’un plan de formation sur des thématiques comme le handicap, la gestion de l’agressivité, les repas… « Nous avons obtenu que ces formations se déroulent sur le temps de travail, pendant le temps de ménage », se réjouit Florise. Au sujet de la question du harcèlement, la mairie s’est engagée sur une « tolérance zéro » et prévoit de mettre en place des formations managériales.
Enfin, une quarantaine de vacataires verront leur contrat de travail régularisé cette année. La charte relative aux missions des Atsem devrait également être actualisée afin de clarifier les rapports avec les équipes éducatives. Quant aux salaires, si les revendications n’ont pas été satisfaites faute de budget suffisant, la CFDT n’entend pas en rester là. « L’année prochaine, on fera la grève en novembre ; c’est le mois de la prime, comme ça, on pourra faire deux, trois jours de grève consécutifs, s’enthousiasme Florise. Il faudra taper plus fort ! »