Lycée professionnel : un plan ambitieux, mais encore flou

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iconeExtrait de l’hebdo n°3873

Le président de la République a présenté, jeudi 4 mai à Saintes (Charente-Maritime), une réforme ambitieuse du lycée professionnel. La CFDT regrette toutefois que le « travailler plus pour gagner plus » soit encore une fois mis en avant par l’exécutif.

Par Jérôme Citron— Publié le 09/05/2023 à 12h00

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©Alexandra BONNEFOY/REA

C’était une promesse de campagne du président-candidat à sa réélection, c’est à présent une réforme. Après l’apprentissage, le lycée professionnel s’apprête à faire sa mue. L’exécutif promet un milliard d’euros d’investissement par an pour transformer un système à bout de souffle qui accueille 621 000 élèves ; des élèves dont une partie cumulent difficultés à la fois scolaires et sociales. Les chiffres parlent d’eux-mêmes : quatre lycéens professionnels sur dix sont boursiers ; 40 % ont une maîtrise fragile du français à l’entrée en seconde et 70 % ont une maîtrise fragile en mathématiques. Le décrochage scolaire des élèves en lycée professionnel est « presque dix fois plus fréquent » que celui des élèves en lycée général, selon les statistiques de l’Éducation nationale.

Face à ce tableau peu reluisant, la réforme présentée par le chef de l’État en déplacement à Saintes le 4 mai dernier mise sur un renforcement des savoirs fondamentaux avec le développement d’enseignements en petits groupes. Elle mise également sur l’accompagnement pour éviter le décrochage scolaire et mieux orienter les jeunes. Aujourd’hui, un quart de ces lycéens se retrouvent une fois leur scolarité terminée, sans emploi ni formation pendant plusieurs mois.

Une offre de formation plus en lien avec le marché du travail

L’exécutif souhaite également revoir l’offre de formation, en lien avec les régions, pour tenir compte de l’évolution du marché du travail. Avec, par exemple, des formations courtes et complémentaires d’un an que les lycéens pourraient suivre pour démultiplier leurs chances de trouver un emploi. Enfin, chaque lycée devra créer un bureau dédié à la relation avec les entreprises afin de faciliter la recherche de stages. Autant de mesures plutôt saluées par les organisations syndicales, même si elles attendent de voir comment elles s’appliqueront concrètement sur le terrain.

Les deux fédérations de l’enseignement CFDT (le SGEN pour l’enseignement public et la FEP pour l’enseignement privé) se félicitent tout particulièrement que ce plan renforce le lycée professionnel alors que l’intention initiale du gouvernement semblait au contraire se tourner vers un modèle type « apprentissage ». L’exécutif a ainsi abandonné son idée d’augmenter de 50 % les périodes de stage. La CFDT a été entendue sur ce point. « Les mesures contre le décrochage et pour l’insertion professionnelle vont également dans le bon sens », insistent-elles. Elles se félicitent enfin de voir les périodes de stages rémunérées tout en demandant qu’un travail soit mené pour combattre les biais discriminants (genre, origine sociale, territoires) lors de ces expériences en entreprise.

Signal désastreux

À propos de l'auteur

Jérôme Citron
rédacteur en chef adjoint de CFDT Magazine

En revanche, les fédérations ne décolèrent pas sur la manière dont cet accompagnement a été pensé côté professeur. « Proposer aux professeurs un “super pacte LP [lycée professionnel]” est un nouveau signe du mépris et de la méconnaissance de la réalité de leur investissement au service des élèves », écrivent-elles dans un communiqué commun. « La CFDT refuse l’idée d’ajouter du travail à des personnels déjà épuisés. Elle revendique que l’ensemble des tâches déjà effectuées soient rémunérées à leur juste valeur. » En effet, à l’instar de ce qui a été imaginé pour les enseignants des collèges et des lycées généraux, l’exécutif mise sur le volontariat et des primes pour renforcer l’accompagnement des élèves. Un signal particulièrement désastreux pour des enseignants qui attendent une vraie revalorisation de leur salaire. Un « travailler plus pour gagner plus » intolérable dans la période actuelle.